Livres carolins (IV: 10): À propos de ce que l’Évangile ne rapporte nulle part que Jésus ait envoyé son image à Abgar, comme certains le prétendent
Dans le présent chapitre, les livres carolins donnent une réponse à la légende, souvent utilisée, du roi Abgar - auquel Jésus aurait envoyé son portrait. Outre la distinction fondamentale que l'auteur dresse entre les livres canoniques et les traditions non-bibliques, on trouvera dans ces lignes une admirable comparaison entre l’Évangile tétramorphe et le Paradis perdu.
L’Évangile est une bonne nouvelle, un véritable bon message, car ceux qui le reçoivent sont appelés fils de Dieu.
C’est un fleuve à quatre bras issu d’une seule source ineffable, celle du Paradis, et se divisant admirablement en quatre rivières, envoyées pour arroser sainement les cœurs desséchés.
C’est le chemin qui mène à la vie, la lumière qui nous ramène des ténèbres des vices, et qui dirige sans danger la marche des mortels vers les réalités célestes.
C’est la plus florissante forteresse de la cité (de Dieu), où se tenir solidement est un immense bienfait pour la vie, tandis que s’en éloigner est un danger mortel.
Ce sont les flots de la vérité, qui ne trompent ni ne peuvent être trompés ; et dans ces vastes eaux où l’on trouve de nombreux récits glorieux des actes du Seigneur, il n’est jamais fait mention que le Seigneur ait reçu une lettre d’un certain roi Abgar, ni qu’il lui ait répondu.
Ces deux lettres, en effet, comme elles ne proviennent d’aucune lecture des saints Évangiles, et qu’elles ont été clairement rejetées par saint Gélase, évêque de Rome, ainsi que par d’autres hommes également catholiques et orthodoxes, en tant qu’écrits apocryphes, ne doivent en aucune façon être utilisées comme témoignage, car, tout comme les autres écrits apocryphes, elles sont peu dignes de confiance pour confirmer ou infirmer les questions débattues.
Ces textes, donc, n’ayant aucune mention dans les codex évangéliques rédigés par les évangélistes,
et ayant été avec raison classés parmi les apocryphes par les catholiques, furent produits dans un synode par ceux qui voulaient soutenir l’erreur liée à l’adoration des images.
Mais personne ne sait, même de façon vague ou partielle, où l’on pourrait lire qu’Abgar aurait demandé à adorer une certaine image du Seigneur, ou que le Seigneur lui aurait envoyé une image pour être adorée.
Et si ceux qui veulent défendre cette fable par ces lettres — l’une prétendument reçue du Seigneur, l’autre envoyée à Abgar — affirment : “Tout ce que Jésus a dit ou fait n’a pas été écrit dans l’Évangile”, et qu’ils se servent du témoignage de Jean, qui dit :
“Jésus a fait encore beaucoup d’autres signes en présence de ses disciples, qui ne sont pas écrits dans ce livre”,
ils doivent bien noter que cela se réfère aux miracles, et non aux lettres, aux signes, et non aux ordonnances.
Mais puisque ces lettres sont exclues des lectures évangéliques, et considérées comme apocryphes par l’Église catholique, il est évident qu’elles ne fournissent aucun fondement pour l’adoration des images.
Nous, pour notre part, méprisons l’adoration des images, et, en lisant ces lettres parmi les écrits apocryphes, nous approuvons ce qui est bon et retenons ce qui est digne, mais rejetons tout ce qui ne l’est pas.
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