La quête des originaux

 


Prenant prétexte de certaines curiosités et variantes dans les manuscrits, certains esprits prétendent que le texte biblique, tel qu’il nous est publiquement parvenu dans l’Église, aurait été frelaté par les accidents de l’histoire ; qu’il appartiendrait donc à des archéologues et à des experts de reconstituer les originaux, au moyen de recettes, voire de petits calculs dont ils auraient le secret…
On essaye ainsi d’expulser des Écritures des passages comme la conclusion longue de Marc, ou le récit de la femme adultère, en Jean 7 : 51 – 8 : 11 (*).

Puisque les contestateurs aiment les hypothèses, disons quant à nous que c’est peut-être en vain qu'ils se mettent en peine d’exhumer « l’original » de chaque livre. Car, si les Écritures sont pleinement inspirées par Dieu, cette inspiration ne consiste ni en une séance d'écriture automatique, ni en une autre forme d'effacement de l'humanité des auteurs ou de leurs procédés d'écriture et de publication.

Ainsi, saint Irénée de Lyon, Papias et Eusèbe ne rapportent-ils pas que Matthieu a écrit son évangile d’abord en hébreux, puis en grec ? Et qui a dit qu’il n’avait produit, en grec, qu'un seul et unique manuscrit ?
Or, si l’évangéliste avait produit un certain nombre d’originaux, qui oserait affirmer que l’Esprit qui l’inspirait n’aurait pas pu assumer quelques variantes, comme il l’a pourtant fait avec les paroles du Décalogue (Exode 20 / Deutéronome 5), ou avec celles de l'institution de la Cène (Matthieu 26/ Marc 14 / Luc 22 / 1 Corinthiens 11) ?

Un Philippe Melanchthon a été libre de rédiger deux versions très différentes (latine et allemande) de la même Confession d’Augsbourg ; un évangéliste aurait-il moins de facultés, ou Dieu aurait-il moins de droits qu'un Réformateur ?
Et si les variantes du second amendement, qu'on trouve dans les originaux de la Constitution des États-Unis, n’empêchent pas la Cour suprême de ce pays de dire le droit sur ce point, les « variantes textuelles » dans l’Écriture allaient-elles paralyser davantage l’Église pour formuler sa foi ?
Le fait du Credo prouve que non.

On sait de plus que certains textes ont été dictés (cf. Romains 16 : 22). Serait-il totalement impossible que certains livres aient été librement dictés à plusieurs scribes en même temps, de sorte (par exemple) que chacun d’eux capte et retranscrive, par des tournures distinctes, quoique pareillement dites par le même apôtre, le propos de celui-ci ?
Et ne se pourrait-il pas que, relisant chaque manuscrit, l’apôtre inspiré les ait tous reconnus comme pareillement fidèles et valables ? Dans ces conditions - puisqu’elles témoigneraient de la plasticité de l’Inspiration - la postérité diverse des versions, la trace des variantes notées en marges (peut-être les croisements de divers fragments de manuscrits, etc.) ne sauraient invalider la valeur de l’Écriture telle qu'elle nous est providentiellement parvenue, sous la garde de l’Esprit saint. Bien au contraire ! Par conséquent, la mission de l’Église n’est pas de remettre en question ou de juger cette Écriture, et encore moins de la remplacer par des codex non-sourcés, retrouvés dans les paniers de quelque obscur monastère égyptien, mais de se soumettre et de toujours croire à l'enseignement des Écritures.

Pour conclure, quoi qu’il en soit de cette hypothèse d'originaux multiples, la foi de l’Église ne saurait résider dans la subjectivité de quelques académiciens ou dans la fiabilité prétendue de leurs recettes, mais dans la fidélité du Saint Esprit qui, au cours des siècles, a maintenu et vivifié la foi de l’Église par les Écritures que lisaient nos pères - foi qui tombe mystérieusement en ruines à mesure qu'on applique les méthodes prétentieuses de nos nouveaux écolâtres...

 

Bucerian

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(*)  Preuve que les experts finissent par s’en remettre à leur subjectivité (arbitraire) plutôt qu’à la simple vérité : un critiqueur de la péricope de la femme adultère disait récemment que ce passage contenait selon lui une « déficience théologique » qui plaidait contre son inspiration ; c’est que dans ce texte, Jésus dit à la femme pardonnée : « va et ne pèche plus » et non pas simplement (comme en Luc 7, par exemple) « va en paix ». Selon notre docteur, cela brouillerait le caractère inconditionnel du Salut (sic), en même temps que cela démasquerait un horrible « ajout tardif ».
Qu’est-ce que ces personnes feront du « … ne pèche plus, de peur qu'il ne t'arrive quelque chose de pire » que Jésus a prononcé (si nos critiques le veulent bien), en Jean 5 : 14 ?

Commentaires

Anonyme a dit…
Tertullien (Contre Praxéas II) et saint Cyprien (De l'Unité de l'Église) citent le "Comma johannique" comme partie intégrante de l'épître de saint Jean: I Jn.5/7. Or, ils écrivaient respectivement vers 200 et 250 après J-C. De sorte qu'il est faux de prétendre que I Jn.5/7 n'est qu'un ajout tardif du IVe siècle, comme le prétendent les modernistes. C'est pourquoi, loin de nous fier aux zélateurs du libéralisme théologique, tous gnostiques, nous leur préférons la Tradition du Credo et du Canon scripturaire qui s'est rarement trompée, surtout au sujet des versions bibliques: "textus receptus" ou Nouveau Testament de saint Jean Chrysostome, Vulgate de saint Jérôme et Ancien Testament des Septante.

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