Annotations sur la Concorde de Wittenberg (7/9)




De l'absolution.


La confession auriculaire n'est pas d'institution divine (1). De plus, elle n'est accompagnée d'aucun signe ou élément sensible (2), et n'est donc en aucune façon un sacrement.
Pourtant, Rome compte ce rite dans son septénaire sacramentel; de plus, les Réformateurs de Wittenberg ont d'abord maintenu cette coutume tant par irénisme et pour le maintien du bon ordre que pour le secours que l'absolution pouvait procurer aux consciences faibles (3). Reprenant les grandes lignes du consensus déjà trouvé à Marbourg, les théologiens protestants consacrèrent un dernier capitulaire à ce sujet, dans la Concorde. Quelques remarques méritent d'être faites:

A) Le titre employé pour cette rubrique (De l'absolution) met en exergue le fait que les protestants n'ont pas cherché à maintenir une prescription légaliste, centrée sur l'énumération des péchés (la confesse), mais à mettre l'accent sur le réconfort que procure l'Évangile: la proclamation du pardon des péchés.
Là où Rome enseigne que les fidèles doivent énumérer, autant que faire se peut, chacun de leurs péchés - afin d'être déliés par le prêtre de la peine éternelle encourue pour ces fautes et se voir prescrire des œuvres pour faire eux-mêmes le reste de leur salut (4), le protestantisme ne conserve que l'idée d'une discussion par laquelle un fidèle cherche et obtient des conseils, et à l'occasion de laquelle le ministre lui rappelle l'absolution, le pardon des péchés en Christ, par la foi seule.

B) Chacun est et doit donc rester libre de recourir selon ses besoins à cette forme d'accompagnement spirituel. Contrairement à la fausse doctrine enseignée par Rome, Dieu n'a pas institué la confession auriculaire; loin s'en faut qu'il l'ait prescrite comme "seconde planche de salut" nécessaire pour impétrer la rémission des péchés commis après le baptême (comme l'est le baptême pour les personnes encore extérieures à l’Église, selon les termes du concile de Trente). Au contraire, c'est toujours au pardon des péchés qui est célébré dans le baptême que nous devons regarder avec foi.

C) Rappelons ici que l'annonce de cette absolution n'est pas exclusivement réservée à un cadre individuel et privé, mais qu'elle est tout aussi bien publique et collective. Ainsi, contre l'avis du pasteur de Nuremberg, Andreas Osiander (qui avait émis l'opinion que l'absolution ne pouvait être proclamée qu'en privé, à une personne à la fois, en raison de la présence d'impénitents dans les masses), les docteurs de Wittenberg avaient répondu que la prédication elle-même est une absolution publique et générale, si bien que l'incapacité des impies à saisir ce bienfait ne devait pas en priver l'ensemble du peuple croyant (5). On trouve ici une compréhension qui se retrouvera plus tard encore dans le catéchisme de Heidelberg (6), à savoir que le pouvoir des clés est exercé par la prédication de l'Évangile - ainsi que par la disciple ecclésiastique, sur laquelle nous reviendrons dans le prochain chapitre de cette série.

En résumé: la prédication de l'Évangile annonce et atteste publiquement à tous les fidèles en général, et à chacun en particulier, que lorsqu'ils saisissent avec une vraie foi sa promesse, tous leurs péchés leur sont véritablement pardonnés par Dieu à cause des mérites du Christ (7).
Puisse cette absolution de l'Évangile, que les pasteurs ne peuvent que déclarer (ou annoncer) aux fidèles, être le fondement de notre joie, maintenant et pour l'éternité. Amen!

A suivre...


Bucerian

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1. Confession d'Augsbourg, article 25.
2. A l’inverse de l’eau pour le baptême ou du pain et du vin pour l’eucharistie.
3. Confession d'Augsbourg, article 11. 
4. Entendue ainsi, la confession auriculaire fait partie des inventions humaines inspirées par les ruses de Satan (cf. Confession de La Rochelle, article 24).
5. Gordon A. Jensen: The Wittenberg Concord, Creating space for dialogue. Fortress Press, 2018 (page 122).
6. Catéchisme de Heidelberg, 31e dimanche. 
7. Ibid. 

Commentaires

Anonyme a dit…
La contingence, ou le caractère facultatif, de la confession, auriculaire ou collective, est attestée, aussi, au sein des communautés byzantines. Seule la confession privée à Dieu est d'absolue nécessité, quotidienne, comme nous l'enseignent les termes de l'Oraison dominicale ou "Pater".

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