Les symbolistes n'ont-ils rien?...





Les théologiens luthériens, pour qui la présence du Christ dans la Cène ne dépend pas de la dignité ou de la foi des communiants, ont affirmé que le Christ n'était pas présent dans la Cène des Églises qui ne croient pas à cette présence.
Cette dernière considération semble paradoxale ; en effet, si la présence du corps et du sang est annulée pour ceux qui ne la conçoivent pas correctement, comment affirmer plus longtemps la manducation par les impies ?

Certes, on pourra rétorquer que la présence objective, entrainant la manducation par les impies, dépend de la foi publiquement affichée par une Église à ce sujet. Mais cette opinion entraine beaucoup de difficultés, car les positions n'ont pas toujours été clairement tranchées (et ne le sont parfois toujours pas). Par exemple: l’Église de Ratramne de Corbie avait-elle une Cène réelle ou non? Une Église unioniste a-t-elle une vraie Cène ou non? Ou encore, lorsque les Strasbourgeois signèrent la concorde de Wittenberg, leur Cène devint-elle plus vraie pour le peuple présent là-bas, et ce malgré le fait qu'on accusa plus tard ses pasteurs (dans la Solida Declaratio) d'avoir été fourbes ?...

Il est vrai qu'on peut invoquer, à l'appui de la thèse luthérienne, un exemple semblable : c'est que le baptême conféré dans des sectes anti-trinitaires est réputé nul.
Néanmoins, il existe ici une différence majeure : les sectes anti-trinitaires nient le mystère sur lequel est fondée la foi baptismale (c'est-à-dire la Trinité : Matthieu 28. 19). C'est d'ailleurs la raison pour laquelle ces sectes ne sont pas simplement dépourvues du vrai sacrement, mais aussi et surtout du Salut. 
Mais de leur côté, les symbolistes (sauf s'ils sont ariens ou autres semblables) ne nient pas le mystère dont procède le sacrement - c'est-à-dire : le mystère de l'Incarnation (Matthieu 26. 26). Pour que leur Cène soit tout à fait comparable au baptême des anti-trinitaires, il faudrait que leur religion soit le nestorianisme, voire le docétisme (et dans ce cas, tout comme dans celui des anti-trinitaires, c'est leur âme autant que leur Cène qui serait vide du Christ).

En d'autres termes, il ne semble pas tout à fait pertinent de comparer une erreur sur le sacrement et/ou la manière dont il agit, avec une erreur (ou un déni) sur la Révélation que scelle le sacrement. Autrement, en raison de leurs opinions tout aussi symbolistes concernant le baptême, il paraîtrait nécessaire de déclarer que les baptistes n'administrent pas non plus un vrai baptême, etc. ce qui est exclu même par les réalistes les plus fervents.

Sans cautionner l'erreur symboliste ni vouloir la tolérer, il est semble donc permis de s'interroger sur les conclusions extrêmement sévères que certains ont cru pouvoir en tirer, et envisager plutôt que toute Église qui garde la foi chrétienne (Révélation du Dieu Trinité dans le Verbe fait chair, mort et ressuscité pour le Salut de quiconque croit ; bref: Jean 3. 16, le Credo...), lorsqu'elle s'assemble pour célébrer le repas du Seigneur (en gardant les paroles de l'institution et son usage), bénéficie de la présence de celui-ci, quand bien même ses pasteurs n'en saisiraient pas toute la richesse et n'en parleraient pas de façon cohérente.



Bucerian

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