Annotations Credo # 39


Le baptême: observations générales (*)


Le Symbole mentionne le baptême et intègre ainsi les sacrements dans le discours de l’Église. Par ce terme de "sacrement", on désigne traditionnellement les cérémonies instituées par Jésus-Christ, célébrées au moyen d'éléments sensibles (pour le cas du baptême : l'eau) et auxquelles est jointe la promesse de la Vie. Ces rites, étant les sceaux de la prédication et les marques de l’Église, doivent être célébrés jusqu'à la fin du monde.

A proprement parler, il n'existe donc que deux sacrements :

- le baptême (Matthieu 28. 19-20/ Marc 16. 16) ;
- la Cène (Matthieu 26. 26, ss).

Avant d'aborder la dimension intérieure (de loin la plus importante !) du baptême, il sera utile de traiter certaines difficultés relatives à son administration extérieure ; autrement dit: de répondre à la question de savoir quelles sont les conditions requises à la célébration d'un véritable baptême chrétien.


1. La Parole

Pour qu'un baptême valide soit célébré,  il faut avant tout que soit présente la Parole de Notre Seigneur.
On baptise donc au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit (Matthieu 28. 19).
Toutefois, dans les sectes où seules ces syllabes résonnent, mais où l'on en nie préalablement et publiquement le sens naturel et véritable, (les sectes anti-trinitaires) on considère à bon droit que la parole du Christ n'est pas présente; que le baptême conféré est donc invalide.
C'est pour une telle raison que le canon 19 du concile de Nicée a décidé que:


 A l’égard des paulianistes qui veulent revenir à l’Église catholique, il faut observer l’ordonnance portant qu’ils doivent être rebaptisés. Si quelques-uns d’entre eux étaient auparavant membres du clergé, ils seront ordonnés par l’évêque de l’Église catholique après qu’ils auront été rebaptisés, à la condition toutefois qu’ils aient une réputation intacte et qu’ils n’aient pas subi de condamnation. Si l'enquête montre qu’ils sont indignes, on doit les déposer. On agira de même à l’égard des diaconesses, et en général la présente ordonnance sera observée pour tous ceux qui sont sur le tableau de l’Église. Nous rappelons aux diaconesses qui sont dans cette situation qu’elles n’ont pas été ordonnées et qu’elles doivent être simplement comptées parmi les laïques.


2. L'élément

Union de la Parole et d'un élément sensible, la présence de ce dernier est nécessaire à la célébration du sacrement.
Sans eau, donc, ou avec autre chose que de l'eau, il n'y a pas de baptême.
A ce titre, il convient de mettre en garde contre la fantaisie de ceux qui, rejetant le baptême des petits enfants, inventent une cérémonie de présentation, parfois appelée " baptême sec ", pour accueillir publiquement les enfants dans l’Église.
Seul le baptême constitue un tel accueil, et il requiert l'invocation trinitaire avec de l'eau.



3. Le récipiendaire

Le candidat au baptême doit être une personne vivante, n'ayant encore jamais reçu le baptême. On parlera en une autre occasion de la question très disputée du baptême des enfants (annotation 42).
Pour l'heure, il suffit de rappeler le rejet de certaines pratiques, comme la réitération du baptême, ou encore le " baptême " des cloches, le " baptême " des animaux, ou même le " baptême " des morts, pratiqués dans certaines dénominations.
Dans tous ces cas, il n'y a absolument pas de baptême chrétien.

NB: même si la valeur du baptême ne repose pas sur la subjectivité du candidat, il est évidemment hors de question de baptiser une personne contre sa volonté, ou contre la volonté de ses tuteurs légaux.



4. L'acte sacramental

On discute âprement la question de savoir s'il faut employer l'eau baptismale pour y immerger entièrement le candidat (telle est la doctrine baptiste, quoique le fondateur du baptisme, John Smyth, se soit lui-même baptisé, en 1609, en s'aspergeant), ou s'il suffit de verser l'eau sur la tête du récipiendaire (comme le font généralement les occidentaux).

Or il est vrai que l'immersion entière, que n'a jamais cessé de pratiquer l'Orient, devrait être favorisée:
Luther la recommandait, dans son Formulaire du baptême, joint à son catéchisme. Y revenir permettrait d'ailleurs d'éteindre des querelles peu édifiantes.
Néanmoins, à la question de savoir si cette manière de baptiser est nécessaire pour avoir un vrai baptême, la réponse est " non ".
Trois grands arguments sont en effet invoqués pour prouver le contraire, et leur examen conduit à un triple désaveu:

1) L’étymologie
Les baptistes font valoir que le mot " baptême " , en Grec, veut dire " immersion ". Mais, dans le Nouveau testament, ce mot a un sens plus large et est appliqué à des ablutions et lavements qui n'impliquent pas nécessairement une immersion (Luc 11. 38 / " baptême ", dans le Grec).

2) Le symbolisme 
Les baptistes soutiennent que le baptême symbolise l'ensevelissement, un passage de la mort à la vie. Mais le principe de ce symbole demeure dans l'ablution (même s'il est moins soutenu que dans l'immersion). En effet, le néophyte passe alors à travers et sous les eaux.

3) L'histoire
Les baptistes soutiennent que le baptême par immersion a été la seule forme connue et approuvée de l’Église du premier siècle, mais la Didachè, qui date de cette époque, admet aussi bien que l'eau soit versée sur la tête du candidat (chapitre 7).



5. L'officiant

Il a été rappelé comment le père du baptisme, John Smyth, s'est lui-même rebaptisé, au XVIIe siècle.

Un tel acte est évidemment non-conforme à l'ordonnance du Christ (Matthieu 28 : 19), qui a dit: baptisez-les, et non pas: baptisez-vous (NB : contrairement à ce qui se faisait dans la secte de Qumran, dans le Nouveau Testament, le candidat reçoit toujours le baptême ; il est baptisé ; les formules induisant un rôle actif de sa part [" je me baptise "] ne sont pas correctes et ne doivent donc pas être employées).

De plus, tout le monde convient du fait que l’Église doit ordonner des ministres pour prêcher la Parole et administrer les sacrements.  Reste à savoir si, en cas exceptionnel (situation d'urgence) les " simples " fidèles peuvent baptiser.
La question se pose d'autant qu'on la rencontre en pratique, et que les réponses divergent:
- Luthériens et Anglicans, à la suite d'un Tertullien ou du concile d'Elvire (canon 38) affirment le droit des " laïcs " de baptiser en cas de nécessité.
- Mais les Réformés, à la suite d'un Cyprien de Carthage, ou du 4e concile du même nom (canon 100) affirment au contraire que " Le baptême administré par celui qui n'a point de vocation est entièrement nul " (Discipline du Synode de Dordrecht, chapitre 11. 1).
NB: Cyprien de Carthage, qui a d'ailleurs été ensuite désavoué par Augustin, tenait peut-être pour nuls les baptêmes administrés par les " laïcs ", mais c'était au même motif qu'il tenait pour nuls les baptêmes conférés dans le schisme et l'hérésie. Dans cette perspective, on pourrait se demander avec angoisse ce que valent les " vocations " et donc les baptêmes conférés dans le papisme. Si l'immense majorité des Réformés et Presbytériens reconnaissent les baptêmes donnés par les curés, certains (Presbytériens du Sud, aux États-Unis) en sont venus à la conclusion de leur invalidité. Quant à savoir ( pour l'immense majorité qui reconnaît l'apparente vocation ) ce qu'il en est des actuelles " femmes pasteurs " et donc de leurs actes, la question apparaît encore plus insoluble.

Contre toute tendance donatiste, la difficulté peut être résolue avec l'assertion de Philippe Melanchthon, dans son Traité sur le pouvoir et la primauté  du pape (III. 2):
Là donc où est la véritable Église, là est nécessairement le droit de choisir et d'ordonner les ministres : tout comme, en cas de nécessité, même un laïc peut donner l'absolution  et devenir ministre et pasteur de l'autre ; ou comme Augustin raconte l'histoire de deux chrétiens en bateau, dont l'un baptisa l'autre - qui était catéchumène - et dont l'autre, sitôt baptisé, donna l'absolution au premier.
C'est à cela que tendent les paroles du Christ attestant que les clés sont données à l’Église, et pas seulement à des personnes attitrées: "Là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, etc. " (Matthieu 18. 20).

Tout fidèle peut donc avoir (et a!) vocation à agir comme un ministre de fait pour son prochain, dès lors qu'aucun ministre ordonné n'est présent.

La preuve biblique de cette possibilité est sans doute apportée par le  baptême de Paul (Actes 9), ainsi que l'ont noté les rédacteurs de la Bible de Neuchâtel, ou Bible annotée, au sujet de ce passage (verset 18):
Le futur apôtre fut baptisé par un simple disciple. L’Écriture n'enseigne pas le sacerdoce universel en théorie seulement, mais par des faits.
Le Seigneur a institué le ministère de la Parole, afin de pourvoir à l'instruction et au bon ordre dans l’Église, mais le droit et le devoir de tous les vrais croyants subsiste.
Ici, l'exercice de ce droit avait encore une raison importante : si Saul avait été baptisé par un apôtre, cela l'aurait mis dans une sorte de dépendance à son égard. Il aurait pu paraître qu'il tenait sa mission de cet apôtre. Or il importait qu'il n'en fût pas ainsi.


Conclusion

Quelles sont donc les conditions requises à la célébration d'un véritable baptême chrétien? 
Il faut un candidat vivant, qui n'a jamais été baptisé, et sur lequel un ministre du culte (en cas ordinaire) ou tout autre baptisé (en cas extraordinaire) invoque le nom du Dieu Trinité, en le passant par les eaux - que ce soit par immersion ou par aspersion/ablution.


Bucerian
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(*) : Pour cette annotation, (surtout pour la 5e partie) je me suis inspiré et servi des remarques d'un article intitulé "There is no such thing as lay baptism" et publié en novembre 2016 par le révérend Heath R. Curtis, de l'Eglise Luthérienne du Missouri Synod, aux Etats-Unis.

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