Sermon sur le Baptême de Jésus-Christ.
JÉSUS-CHRIST BAPTISÉ ou LA TRINITÉ
« Et quand Jésus eut été baptisé, il sortit aussitôt hors de l'eau ; et voilà, les cieux lui furent ouverts, et Jean vit l'Esprit de Dieu descendant comme une colombe, et venant sur lui ! Et voilà une voix du ciel disant : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai pris mon bon plaisir.» (Matthieu 3.16-17)
(...) Si les réflexions que je viens de vous présenter laissaient encore quelque obscurité dans votre esprit, ce n'est pas à la doctrine qu'il faudrait vous en prendre, c'est à vous -- ou à moi. Pour que la vérité de ces réflexions vous devînt sensible jusqu'à l'évidence, que faudrait-il chez ceux qui les entendent, ou chez celui qui les expose ? Plus de science théologique ? Non ; mais plus de piété, plus de vie spirituelle. Avec plus de piété, plus de vie spirituelle, ces aspirations de notre âme auxquelles le Père, le Fils et le Saint-Esprit répondent, seront plus senties ; et à proportion qu'elles seront plus senties, la plénitude avec laquelle ils y répondent sera mieux aperçue et mieux appréciée. Rentrez donc en vous-mêmes, vous qui avez quelque expérience des choses divines ; recueillez-vous devant Dieu, et cherchez en vous-mêmes le reste de notre démonstration. Si Jésus-Christ porte la Trinité dans sa personne visible, vous la portez, vous, dans votre homme intérieur, selon l'exacte mesure de votre conformité avec Jésus-Christ. Oui, ce Dieu de l'Évangile, ce Dieu Père, Fils et Saint-Esprit, est celui que cherche votre coeur. Ce mystérieux partage au sein de la rédemption commune, cette distinction vivante dans cette unité véritable, trouve au fond de ce coeur si grand et si combattu, un je ne sais quoi qui l'accueille, et qui l'aurait presque pressentie. Pour toutes les délivrances après lesquelles votre âme soupire, c'est Dieu à qui vous vous attendez, et encore Dieu, et toujours Dieu ; mais si je l'ose dire, c'est un Dieu divers. Vous voulez un Dieu « qui pardonne tant et plus : » achevez la ligne, et vous allez droit au Père. Vous voulez un Dieu qui « fasse l'expiation de vos péchés : » achevez encore, et vous allez droit au Fils. Vous voulez un Dieu qui crée en vous une force et une vie nouvelles : achevez, achevez toujours, et vous allez droit au Saint-Esprit. Ceci vous étonne ? descendez plus avant en vous-mêmes, et nous serons bientôt d'accord. Tous les témoignages que nous avons entendu rendre tantôt à notre doctrine par l'Écriture et par la tradition, vous les lui entendez rendre également par l'expérience individuelle, pour peu que vous ayez appris à l'écouter.
Un Père de l'Église disait : « Dans l'Ancien Testament, nous trouvons Dieu pour nous ; dans les Évangiles, Dieu avec nous ; dans les Actes et les Épîtres, Dieu en nous. » Eh bien ! cet ordre ne se reproduit-il pas dans l'expérience individuelle ? Le premier pas dans la foi chrétienne n'est-il pas de connaître, par la repentance, Dieu pour nous, c'est-à-dire, Dieu le Père ; le second, par la foi en Jésus-Christ, Dieu avec nous ? c'est-à-dire Dieu le Fils ; le troisième, par la vie du Saint-Esprit, Dieu en nous, c'est-à-dire Dieu le Saint-Esprit ? Je disais : à proportion que l'église chrétienne est devenue plus chrétienne, c'est-à-dire plus spirituelle, la Trinité y a été mieux comprise et mieux appréciée ? eh bien ! à mesure que l'âme chrétienne devient plus chrétienne, c'est-à-dire plus sainte ; la Trinité lui devient aussi et plus sensible et plus précieuse.
Tant il est vrai que l'histoire, de l'âme sur ce-point n'est que l'histoire de l'Église en raccourci, et que tout ce que nous avons, appris de l'Écriture et de la tradition achève de se vérifier au fond de la conscience individuelle ! Pour moi, qui m'instruis ici tout en tâchant d'instruire ceux qui m'écoutent, je rends grâces au plus fidèle des Maîtres pour avoir durant quelques semaines concentré ma méditation sur cette matière à la fois si profonde et si salutaires. Cela m'a été bon, je le confesse devant toi, ô mon Dieu ! j'en avais besoin tout le premier, j'en ai recueilli un fruit que mon âme savoure avec délices -- hélas ! et si je ne trouve pourtant que des développements si pauvres, si froids, que je tremble de compromettre mon redoutable sujet, je sens, sachez-le bien, que j'en suis seul responsable, que ma doctrine n'y est pour rien, et qu'il ne me manque qu'une vie chrétienne plus mûre et plus affranchie, pour répandre sur cette terre d'élection des flots de lumière, de vie et d'amour ! Allez maintenant, vous qui étiez disposés à laisser à l'écart la doctrine du Père du Fils et, du Esprit comme une spéculation théologique, allez proposer à un vrai chrétien d'essayer de s'en passer. M'en passer ! et que mettez vous à la place ? Voici devant moi, dans la Parole, de mon Dieu, le Père, le fils, et le Saint-Esprit ; vous qui voulez que je m'en passe, osez aller jusqu'au bout ; dites où je dois prendre ce qu'il faut ajouter à sa plénitude, où ce qu'il en faut retrancher ? Nommez-moi donc ou ce quatrième que je dois joindre aux trois ou celui des trois que je dois supprimer ? Lequel des deux vous paraît le plus téméraire, le plus impie ? Un quatrième à leur adjoindre ; qu'il paraisse ! terre, Église, histoire, univers, ciel, temps, éternité, nommez-le donc ce nom divin que vous tenez caché depuis les siècles ; mais commencez par nous expliquer pourquoi vous l'avez jusqu'à ce jour envié à notre foi, à notre baptême, à notre espérance, à notre amour ! Un des trois à supprimer ; malheureux ! et lequel ? Choisissez, -- Que ce ne soit pas le Père : ou qui me donnera désormais l'assurance de mon pardon ? Que ce ne soit pas le Fils ; ou qui fera désormais l'expiation de mon péché ? Que ce ne soit pas le Saint-Esprit ; ou qui me prêtera, désormais la force de Dieu pour l'oeuvre de Dieu ? En m'ôtant le Père, le Fils ou le Saint-Esprit, vous m'ôtez mon pain quotidien...vous ne me l'ôterez pas ! « Notre Père qui es aux cieux,.... donne-nous chaque jour notre pain quotidien » !
Oh ! que je suis heureux de croire la Trinité ! plus heureux de l'annoncer ! Mais croyez-vous que l'Église se montre sur ce point plus traitable que moi ? Non, vous dis-je : il n'y a rien de saint et de fidèle dans l'Église à quoi votre proposition ne fît horreur. Cherchez plutôt qui l'agrée, cherchez de porte en porte, d'Église en Église, de siècle en siècle ! Ce ne sera pas un Thomas Chalmers, ni un Auguste Neander, ni un Alexandre Vinet, ni un Auguste Rochat, ni aucun de ces saints hommes de Dieu qui ont réveillé l'Église contemporaine. Ce ne sera pas un Calvin, ni un Luther, ni un Cranmer, ni un John Knox, ni aucun de ces serviteurs de Dieu qui rappelèrent, il y a trois siècles, l'Église déchue aux sources pures et primitives de la foi. Ce ne sera pas un Anselme de Cantorbéry, ni un Bernard de Clairvaux, ni un Hilaire de Poitiers, ni aucune de ces lumières qui ont percé la nuit obscure du Moyen Age. Ce ne sera pas un Augustin, ni un Chrysostôme, ni un Athanase, ni un Clément d'Alexandrie, ni aucun de ces Pères des premiers siècles révérés de l'Église universelle. Et qui sera-ce donc ? Un Socin, pour tout réformateur ; un Pélage, pour tout docteur ; un Arius, pour tout Père de l'Église ; -- eh bien ! faites cause commune avec ces noms lugubres, mais rompez avec l'Église fidèle de toutes les époques, de tous les noms, de toutes les communions ! Mais renoncez à trouver une place pour vous dans ce « seul troupeau », que Dieu a promis de rassembler un jour sous « un seul pasteur » !
Oui, et pensez-y sérieusement. Un temps viendra, temps d'amour, temps de grâce, temps de gloire, où les membres fidèles de toutes ces communions entre lesquelles l'Église chrétienne est aujourd'hui partagée se rassembleront pour former une seule Église n'ayant pour tout drapeau que Jésus-Christ seul. Sur quel terrain, je vous le demande, s'assemblera cette Église privilégiée des temps à venir ? Et quel autre en pourrait-elle trouver que ce fond commun qui leur est demeuré à toutes, malgré toutes leurs divergences, malgré les funestes égarements de quelques-unes, « le Dieu vivant et vrai, » Père, Fils et Saint-Esprit ? La Trinité, voilà le point de ralliement de toutes ces Églises ; la Trinité, voilà le commun trésor de tout le peuple de Dieu dispersé ; la Trinité, voilà la pierre d'attente que la main de Dieu a posée dès le commencement, a gardée au travers des siècles, pour y élever en son temps l'Église à venir : -- en la répudiant, vous répudiez l'espoir de cette Église unique à laquelle aspirent les âmes aimantes et fidèles disséminées dans toutes les communions !
Assez ou non pour vous, c'est assez pour moi ! Je ne me dissimule rien de tout ce qu'il y a d'impénétrable dans ces profondeurs ; mais je sens aussi tout ce qu'elles renferment, de lumière, de chaleur et de vie. Je laisse « les choses cachées qui sont pour l'Éternel notre Dieu », mais, je m'attache aux « choses révélées qui sont pour nous et pour nos enfants ». Un jour viendra que tous les voiles seront levés : je ne regretterai point alors, d'avoir cru, comme un enfant, la parole de mon Père céleste, unique chemin pour connaître, sinon la vérité absolue, du moins tout ce que je suis capable d'en embrasser dans ma condition présente. Je m'écrie avec un poète chrétien : Dans un sombre nuage il veut s'envelopper ; Mais il est un rayon qu'il en laisse échapper ; Que me faut-il de plus ? Je marche avec courage, Et content du rayon, j'adore le nuage.
Trinité sainte -- et pourquoi rejetterais-je le nom que l'Église a donné à la foi de l'Évangile ? -- Trinité sainte, je ne t'explique point, mais je t'adore ; et en t'adorant, je te bénis ! Je t'adore, comme « le mystère » des mystères ; je te bénis comme « le mystère de la piété », en même temps, que de la charité ! Père, qui m'as sauvé gratuitement, gloire, à toi ! Fils, qui m'as racheté par ton sang, gloire à toi ! Esprit, qui m'as ouvert les yeux et le coeur, gloire à toi ! Père, Fils et Saint-Esprit, gloire à vous, à toi ! Je te consacre, tout de nouveau mon âme, ma vie, mon ministère ! Baptisé au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, je veux, avec le secours de ta grâce, ô mon Dieu trois fois saint, prêcher au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, vivre au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, mourir au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, pour ne paraître devant le tribunal de ta justice, ainsi changé en tribunal de grâce, qu'au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ! Amen.
Adolphe Monod
1853
« Et quand Jésus eut été baptisé, il sortit aussitôt hors de l'eau ; et voilà, les cieux lui furent ouverts, et Jean vit l'Esprit de Dieu descendant comme une colombe, et venant sur lui ! Et voilà une voix du ciel disant : Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui j'ai pris mon bon plaisir.» (Matthieu 3.16-17)
(...) Si les réflexions que je viens de vous présenter laissaient encore quelque obscurité dans votre esprit, ce n'est pas à la doctrine qu'il faudrait vous en prendre, c'est à vous -- ou à moi. Pour que la vérité de ces réflexions vous devînt sensible jusqu'à l'évidence, que faudrait-il chez ceux qui les entendent, ou chez celui qui les expose ? Plus de science théologique ? Non ; mais plus de piété, plus de vie spirituelle. Avec plus de piété, plus de vie spirituelle, ces aspirations de notre âme auxquelles le Père, le Fils et le Saint-Esprit répondent, seront plus senties ; et à proportion qu'elles seront plus senties, la plénitude avec laquelle ils y répondent sera mieux aperçue et mieux appréciée. Rentrez donc en vous-mêmes, vous qui avez quelque expérience des choses divines ; recueillez-vous devant Dieu, et cherchez en vous-mêmes le reste de notre démonstration. Si Jésus-Christ porte la Trinité dans sa personne visible, vous la portez, vous, dans votre homme intérieur, selon l'exacte mesure de votre conformité avec Jésus-Christ. Oui, ce Dieu de l'Évangile, ce Dieu Père, Fils et Saint-Esprit, est celui que cherche votre coeur. Ce mystérieux partage au sein de la rédemption commune, cette distinction vivante dans cette unité véritable, trouve au fond de ce coeur si grand et si combattu, un je ne sais quoi qui l'accueille, et qui l'aurait presque pressentie. Pour toutes les délivrances après lesquelles votre âme soupire, c'est Dieu à qui vous vous attendez, et encore Dieu, et toujours Dieu ; mais si je l'ose dire, c'est un Dieu divers. Vous voulez un Dieu « qui pardonne tant et plus : » achevez la ligne, et vous allez droit au Père. Vous voulez un Dieu qui « fasse l'expiation de vos péchés : » achevez encore, et vous allez droit au Fils. Vous voulez un Dieu qui crée en vous une force et une vie nouvelles : achevez, achevez toujours, et vous allez droit au Saint-Esprit. Ceci vous étonne ? descendez plus avant en vous-mêmes, et nous serons bientôt d'accord. Tous les témoignages que nous avons entendu rendre tantôt à notre doctrine par l'Écriture et par la tradition, vous les lui entendez rendre également par l'expérience individuelle, pour peu que vous ayez appris à l'écouter.
Un Père de l'Église disait : « Dans l'Ancien Testament, nous trouvons Dieu pour nous ; dans les Évangiles, Dieu avec nous ; dans les Actes et les Épîtres, Dieu en nous. » Eh bien ! cet ordre ne se reproduit-il pas dans l'expérience individuelle ? Le premier pas dans la foi chrétienne n'est-il pas de connaître, par la repentance, Dieu pour nous, c'est-à-dire, Dieu le Père ; le second, par la foi en Jésus-Christ, Dieu avec nous ? c'est-à-dire Dieu le Fils ; le troisième, par la vie du Saint-Esprit, Dieu en nous, c'est-à-dire Dieu le Saint-Esprit ? Je disais : à proportion que l'église chrétienne est devenue plus chrétienne, c'est-à-dire plus spirituelle, la Trinité y a été mieux comprise et mieux appréciée ? eh bien ! à mesure que l'âme chrétienne devient plus chrétienne, c'est-à-dire plus sainte ; la Trinité lui devient aussi et plus sensible et plus précieuse.
Tant il est vrai que l'histoire, de l'âme sur ce-point n'est que l'histoire de l'Église en raccourci, et que tout ce que nous avons, appris de l'Écriture et de la tradition achève de se vérifier au fond de la conscience individuelle ! Pour moi, qui m'instruis ici tout en tâchant d'instruire ceux qui m'écoutent, je rends grâces au plus fidèle des Maîtres pour avoir durant quelques semaines concentré ma méditation sur cette matière à la fois si profonde et si salutaires. Cela m'a été bon, je le confesse devant toi, ô mon Dieu ! j'en avais besoin tout le premier, j'en ai recueilli un fruit que mon âme savoure avec délices -- hélas ! et si je ne trouve pourtant que des développements si pauvres, si froids, que je tremble de compromettre mon redoutable sujet, je sens, sachez-le bien, que j'en suis seul responsable, que ma doctrine n'y est pour rien, et qu'il ne me manque qu'une vie chrétienne plus mûre et plus affranchie, pour répandre sur cette terre d'élection des flots de lumière, de vie et d'amour ! Allez maintenant, vous qui étiez disposés à laisser à l'écart la doctrine du Père du Fils et, du Esprit comme une spéculation théologique, allez proposer à un vrai chrétien d'essayer de s'en passer. M'en passer ! et que mettez vous à la place ? Voici devant moi, dans la Parole, de mon Dieu, le Père, le fils, et le Saint-Esprit ; vous qui voulez que je m'en passe, osez aller jusqu'au bout ; dites où je dois prendre ce qu'il faut ajouter à sa plénitude, où ce qu'il en faut retrancher ? Nommez-moi donc ou ce quatrième que je dois joindre aux trois ou celui des trois que je dois supprimer ? Lequel des deux vous paraît le plus téméraire, le plus impie ? Un quatrième à leur adjoindre ; qu'il paraisse ! terre, Église, histoire, univers, ciel, temps, éternité, nommez-le donc ce nom divin que vous tenez caché depuis les siècles ; mais commencez par nous expliquer pourquoi vous l'avez jusqu'à ce jour envié à notre foi, à notre baptême, à notre espérance, à notre amour ! Un des trois à supprimer ; malheureux ! et lequel ? Choisissez, -- Que ce ne soit pas le Père : ou qui me donnera désormais l'assurance de mon pardon ? Que ce ne soit pas le Fils ; ou qui fera désormais l'expiation de mon péché ? Que ce ne soit pas le Saint-Esprit ; ou qui me prêtera, désormais la force de Dieu pour l'oeuvre de Dieu ? En m'ôtant le Père, le Fils ou le Saint-Esprit, vous m'ôtez mon pain quotidien...vous ne me l'ôterez pas ! « Notre Père qui es aux cieux,.... donne-nous chaque jour notre pain quotidien » !
Oh ! que je suis heureux de croire la Trinité ! plus heureux de l'annoncer ! Mais croyez-vous que l'Église se montre sur ce point plus traitable que moi ? Non, vous dis-je : il n'y a rien de saint et de fidèle dans l'Église à quoi votre proposition ne fît horreur. Cherchez plutôt qui l'agrée, cherchez de porte en porte, d'Église en Église, de siècle en siècle ! Ce ne sera pas un Thomas Chalmers, ni un Auguste Neander, ni un Alexandre Vinet, ni un Auguste Rochat, ni aucun de ces saints hommes de Dieu qui ont réveillé l'Église contemporaine. Ce ne sera pas un Calvin, ni un Luther, ni un Cranmer, ni un John Knox, ni aucun de ces serviteurs de Dieu qui rappelèrent, il y a trois siècles, l'Église déchue aux sources pures et primitives de la foi. Ce ne sera pas un Anselme de Cantorbéry, ni un Bernard de Clairvaux, ni un Hilaire de Poitiers, ni aucune de ces lumières qui ont percé la nuit obscure du Moyen Age. Ce ne sera pas un Augustin, ni un Chrysostôme, ni un Athanase, ni un Clément d'Alexandrie, ni aucun de ces Pères des premiers siècles révérés de l'Église universelle. Et qui sera-ce donc ? Un Socin, pour tout réformateur ; un Pélage, pour tout docteur ; un Arius, pour tout Père de l'Église ; -- eh bien ! faites cause commune avec ces noms lugubres, mais rompez avec l'Église fidèle de toutes les époques, de tous les noms, de toutes les communions ! Mais renoncez à trouver une place pour vous dans ce « seul troupeau », que Dieu a promis de rassembler un jour sous « un seul pasteur » !
Oui, et pensez-y sérieusement. Un temps viendra, temps d'amour, temps de grâce, temps de gloire, où les membres fidèles de toutes ces communions entre lesquelles l'Église chrétienne est aujourd'hui partagée se rassembleront pour former une seule Église n'ayant pour tout drapeau que Jésus-Christ seul. Sur quel terrain, je vous le demande, s'assemblera cette Église privilégiée des temps à venir ? Et quel autre en pourrait-elle trouver que ce fond commun qui leur est demeuré à toutes, malgré toutes leurs divergences, malgré les funestes égarements de quelques-unes, « le Dieu vivant et vrai, » Père, Fils et Saint-Esprit ? La Trinité, voilà le point de ralliement de toutes ces Églises ; la Trinité, voilà le commun trésor de tout le peuple de Dieu dispersé ; la Trinité, voilà la pierre d'attente que la main de Dieu a posée dès le commencement, a gardée au travers des siècles, pour y élever en son temps l'Église à venir : -- en la répudiant, vous répudiez l'espoir de cette Église unique à laquelle aspirent les âmes aimantes et fidèles disséminées dans toutes les communions !
Assez ou non pour vous, c'est assez pour moi ! Je ne me dissimule rien de tout ce qu'il y a d'impénétrable dans ces profondeurs ; mais je sens aussi tout ce qu'elles renferment, de lumière, de chaleur et de vie. Je laisse « les choses cachées qui sont pour l'Éternel notre Dieu », mais, je m'attache aux « choses révélées qui sont pour nous et pour nos enfants ». Un jour viendra que tous les voiles seront levés : je ne regretterai point alors, d'avoir cru, comme un enfant, la parole de mon Père céleste, unique chemin pour connaître, sinon la vérité absolue, du moins tout ce que je suis capable d'en embrasser dans ma condition présente. Je m'écrie avec un poète chrétien : Dans un sombre nuage il veut s'envelopper ; Mais il est un rayon qu'il en laisse échapper ; Que me faut-il de plus ? Je marche avec courage, Et content du rayon, j'adore le nuage.
Trinité sainte -- et pourquoi rejetterais-je le nom que l'Église a donné à la foi de l'Évangile ? -- Trinité sainte, je ne t'explique point, mais je t'adore ; et en t'adorant, je te bénis ! Je t'adore, comme « le mystère » des mystères ; je te bénis comme « le mystère de la piété », en même temps, que de la charité ! Père, qui m'as sauvé gratuitement, gloire, à toi ! Fils, qui m'as racheté par ton sang, gloire à toi ! Esprit, qui m'as ouvert les yeux et le coeur, gloire à toi ! Père, Fils et Saint-Esprit, gloire à vous, à toi ! Je te consacre, tout de nouveau mon âme, ma vie, mon ministère ! Baptisé au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, je veux, avec le secours de ta grâce, ô mon Dieu trois fois saint, prêcher au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, vivre au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, mourir au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, pour ne paraître devant le tribunal de ta justice, ainsi changé en tribunal de grâce, qu'au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit ! Amen.
Adolphe Monod
1853
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