De la peine capitale

En France, la peine de mort a été abolie pour les criminels. Récemment, le pape de Rome a aussi modifié le catéchisme de sa dénomination : non pas pour y renier le purgatoire ou d'autres choses contraires à la doctrine orthodoxe de la justification par la foi (que Rome a prétendument accepté en 1999), mais pour proscrire à son tour... la peine de mort.
Mon but ici n'est pas de militer pour le rétablissement de cette peine, ni de proposer un argumentaire en ce sens, mais de partager quelques considérations sur le fondement sur lequel on a rejeté cette sanction - et qui est, je le pense, un très mauvais fondement.

Je mets de côté les arguments "pratiques" (risque d'erreur judiciaire irréparable, risque d'application arbitraire, etc.) parce que ces arguments sont manifestement des arguments auxiliaires et qu'ils n'appellent de réponse que dans le cadre d'un débat auquel j'ai renoncé ici. Reste que l'abolition de la peine de mort semble reposer fondamentalement sur l'idée qu'il n'existe aucun crime assez grand, ni assez grave, pour justifier une peine irrévocable. Il existerait ainsi un "droit à la vie" qu'une ONG comme Amnesty International rappelle d'emblée, dans son argumentaire. Un droit à la vie pour chacun : non pas certes pour un petit enfant innocent dans le ventre de sa mère (quoi qu'en disent la Déclaration des Droits de l'enfant de 1959, principe 4, ou la Convention internationale relative aux droits de l'enfant, de 1989, article 6) mais pour le criminel, oui.

On peut se demander si cette opinion humaniste n'est pas plus ou moins consciemment dirigée contre le Ciel et son assertion que : le salaire du péché, c'est la mort (Romains 6. 23) et que tous ceux qui pratiquent de telles choses sont dignes de mort (1. 32). Cette réprobation absolue de l'exécution des coupables  mène en effet à un relativisme aveugle entre  l'action de la personne privée et celle de la force publique (toujours selon Amnesty International : Un Etat ne peut à la fois interdire le fait de tuer tout en le pratiquant lui-même *); il ne serait donc pas étonnant qu'en définitive, le même relativisme concerne Dieu lui-même, dont le prince n'est jamais que le ministre (cf. Romains 13), coupable de transgresser les droits du coupable...

Sans être assoiffé de sang, et sans nécessairement chercher à revenir sur l'abolition, on peut déplorer que celle-ci se fonde sur l'idée (fausse) selon laquelle la peine de mort serait, par définition, une injustice des juges et une faute des bourreaux contre le condamné - qui serait alors presque en droit de sermonner ceux qui le condamnent (!)
C'est une chose en effet de surmonter la condamnation, dure mais légitime, par la miséricorde - et, dans le cas présent, de tempérer la rigueur de la condamnation par la miséricorde, en commuant la peine (en l’occurrence, à une perpétuité réelle). 
C'en est une tout autre de nier la légitimité de la condamnation et de prétendre que la miséricorde est la justice.
Dans le premier cas, on dit la gravité du crime et le châtiment terriblement juste qu'il appelle. On fait, aussi, sentir la puissante saveur et l'extrême valeur de la miséricorde.
Dans le second cas, on prêche l'impunité et l'on accorde tant de valeur à la dignité du sang humain qu'un tueur d'enfant peut finir par réclamer la liberté qui lui est (soi-disant) due, pour s'en aller dealer de la drogue, entre la parution de ses mémoires (histoire malheureusement vraie).


Bucerian


________

* Peut-il alors nous interdire de séquestrer un voisin dans notre cave, tout en enfermant des gens en prison?...


Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Parlez de Jésus-Christ, ou taisez-vous

Sacrement de confesse?

Eglise Protestante Unie de France : l'alternative