Déclaration conjointe sur la Justification
Introduction:
Après le Conseil Méthodiste Mondial (en 2006) c'est la Communion Mondiale d’Églises Réformées (CMER) qui a ratifié la "Déclaration conjointe sur la doctrine de la justification" - initialement signée par la Fédération Luthérienne Mondiale et le Vatican, en 1999.
Après le Conseil Méthodiste Mondial (en 2006) c'est la Communion Mondiale d’Églises Réformées (CMER) qui a ratifié la "Déclaration conjointe sur la doctrine de la justification" - initialement signée par la Fédération Luthérienne Mondiale et le Vatican, en 1999.
Ce document est généralement présenté comme une pièce majeure du dispositif œcuménique. A titre d'exemple, après la signature par la CMER, le journal La Croix a publié un article intitulé: "Œcuménisme, les Réformés mettent fin à 500 ans de contentieux".
Est-ce vrai?
Et si ce document profite à l'unité des hommes, peut-on en dire autant pour ce qui concerne la vérité divine?
1. La vérité chrétienne
Avant d'apporter une réponse à cette interrogation, il faut avant tout souligner le fait que le contenu de la foi chrétienne n'est pas quelque chose que l’Église devrait découvrir (et encore moins: construire!) au cours d'un long processus historique.
La foi a été transmise aux saints une fois pour toutes (Jude 3).
Par conséquent, le contenu du Symbole, ou Credo (qui est le résumé officiel de la foi chrétienne) est aussi certainement vrai que définitif. On peut et doit donc dire, avec Tertullien que la foi chrétienne, comme contenu, ou doctrine, est irréformable (Tertullien, Traité des Vierges, chapitre 1).
Or, la doctrine de la Justification par la foi est un article de cette foi.
A ce titre, cette doctrine a sans doute été "redécouverte" par nombre de chrétiens (à titre personnel) au cours du temps, notamment au XVIe siècle. Mais l’Église, en tant que telle, n'a jamais enseigné autre chose que cet article; aussi n'a-t-elle fait que rappeler ou réaffirmer, au XVIe siècle, cette foi de toujours:
A ce titre, cette doctrine a sans doute été "redécouverte" par nombre de chrétiens (à titre personnel) au cours du temps, notamment au XVIe siècle. Mais l’Église, en tant que telle, n'a jamais enseigné autre chose que cet article; aussi n'a-t-elle fait que rappeler ou réaffirmer, au XVIe siècle, cette foi de toujours:
"... ce n'est pas par nous-mêmes que nous sommes justifiés, ni par notre sagesse, ni par notre intelligence, ni par notre piété, ni par les œuvres que nous avons pratiquées en toute sainteté de cœur, mais par la foi; car c'est par la foi qu'ont été justifiés tous les hommes depuis le commencement, par le Dieu tout-puissant, à qui soit la gloire au siècle des siècles. Amen".
Clément de Rome, (1 Corinthiens 32. 3)
2. Importance de la doctrine de la justification
Non seulement le dogme de la Justification est un article de la foi, mais il en est même le cœur, "le principal article", écrivait Calvin (Institution de la Religion Chrétienne, III, xi, 1).
Pourquoi?
Parce qu'il est absolument nécessaire que les croyants sachent où trouver la paix de leur âme, et qu'ils glorifient le Christ en confessant qu'il est, Lui et Lui seul, ce ferme rocher.
L'Apologie de la Confession d'Augsbourg (dont une bonne partie du texte est consacrée à la question de la Justification!) explique que "l'objet de cette discussion est une grande chose: il s'agit de l'honneur du Christ; et il s'agit de savoir d'où les hommes de bon sens tirent un sûr et ferme réconfort, si c'est en Christ ou dans nos œuvres que nous devons mettre notre confiance".
Luther a ainsi écrit que "sur cet article, aucun écart ou concession n'est possible, le ciel et la terre, ou tout ce qui est périssable dussent-ils crouler" (Articles de Smalkalde, II, 1).
Le message (tant de fois présenté, confessé et défendu!) de la Justification par la foi est donc ce qu'il faut professer dans toute sa pureté, avec clarté, pour le Salut éternel des âmes.
Le Christ, Roi, Prêtre et Prophète suprême de l'Humanité, y a veillé, en formulant cet admirable résumé, que "Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils Unique, afin que quiconque croit en Lui ne périsse pas, mais qu'il ait la vie éternelle"! (Jean 3. 16).
Magnifique vérité, toute simple et salutaire! Comment pourrait-on la dissimuler ou accepter qu'elle soit dissimulée?...
3. Rome et le rejet de la vérité de la justification par la foi
C'est un fait historique que, lors de la "bataille" doctrinale du XVIe siècle, nos Églises ont protesté la vérité évangélique, et que le papisme a examiné, rejeté et condamné cette vérité.
Voici quelques textes confessionnels, ou Symboliques, de la Réforme Protestante, antérieurs à l'an 1547:
Confession d'Augsbourg, article 4:
Nous enseignons aussi que nous ne pouvons pas
obtenir la rémission des péchés et la justice devant
Dieu par notre propre mérite, par nos œuvres ou par nos satisfactions,
mais que nous obtenons la rémission des péchés et
que nous sommes justifiés devant Dieu par pure grâce, à
cause de Jésus-Christ et par la foi, -- lorsque nous croyons que
Christ a souffert pour nous, et que, grâce à lui, le pardon
des péchés, la justice et la vie éternelle nous sont
accordés. Car Dieu veut que cette foi nous tienne lieu de
justice devant lui, il veut nous l'imputer à justice, comme l'explique
saint Paul aux chapitres 3 et 4 de l'Épître aux Romains.
Confession Tetrapolitaine, article 3:
Nos prédicateurs ont enseigné que toute cette justification doit être attribuée au bon plaisir de Dieu et au mérite du Christ et qu'elle doit être reçue uniquement par la foi. Articles de Marbourg: Septièmement, qu'une telle foi est notre Justice devant Dieu, au regard de quoi Dieu nous reconnaît et regarde comme justes, pieux et saints, en dehors de toute œuvre et mérite et à travers laquelle il nous délivre du péché de la mort et de l'enfer nous reçoit par grâce et nous sauve, pour l'amour de son Fils en lequel nous croyons, et ainsi nous réjouissons et participons de la Justice de son Fils, de sa vie et de toutes ses bénédictions. [ainsi, toute vie monastique et tout vœux, lorsqu'on les regarde comme une aide pour le salut, sont condamnés].
A travers ces multiples exposés (il y en aurait d'autres: catéchismes de Luther, Articles de Smalkalde, Confession de Genève de 1536, etc.) on retrouve toujours une seule et même doctrine, caractéristique du Protestantisme: la doctrine de la Justification par la foi seule, en Christ seul.
Or, c'est précisément cette doctrine (et non des formulations jugées défaillantes) qui a été condamnée par Rome, au concile de Trente, lors de sa 6e session, du 13 janvier 1547:
Or, c'est précisément cette doctrine (et non des formulations jugées défaillantes) qui a été condamnée par Rome, au concile de Trente, lors de sa 6e session, du 13 janvier 1547:
"Ce n'est pas sans la perte de nombreuses âmes et un grave
détriment pour l'unité de l’Église que s'est répandue en notre temps une
doctrine erronée concernant la justification".(Denzinger, 1520)
Il y a donc ici, sur ce point capital de la foi, un contentieux historique et théologique très grave.
Au delà de sujets qui n'ont jamais été disputés (que l'homme est perdu en Adam, qu'il lui faut un sauveur, que ce sauveur est Christ, que la foi est nécessaire, que les croyants sincères pratiquent nécessairement les bonnes œuvres, etc.) reste une contradiction énorme entre Rome et l’Église chrétienne:
lorsque nous disons être justifiés au moyen de la foi (comme le fait le § 25 de la déclaration conjointe) cela est-il une sorte de synecdoque "parce que la foi est le commencement du Salut" et "le fondement de toute justification" (cf concile de Trente, 6e session, chapitre 8 / Denzinger § 1532) ou cela est-il la totalité de notre justification, parce que "Dieu veut que cette foi nous tienne lieu de justice devant lui, il veut nous l'imputer à justice" (Confession d'Augsbourg -- supra)?
Il y a donc ici, sur ce point capital de la foi, un contentieux historique et théologique très grave.
Au delà de sujets qui n'ont jamais été disputés (que l'homme est perdu en Adam, qu'il lui faut un sauveur, que ce sauveur est Christ, que la foi est nécessaire, que les croyants sincères pratiquent nécessairement les bonnes œuvres, etc.) reste une contradiction énorme entre Rome et l’Église chrétienne:
lorsque nous disons être justifiés au moyen de la foi (comme le fait le § 25 de la déclaration conjointe) cela est-il une sorte de synecdoque "parce que la foi est le commencement du Salut" et "le fondement de toute justification" (cf concile de Trente, 6e session, chapitre 8 / Denzinger § 1532) ou cela est-il la totalité de notre justification, parce que "Dieu veut que cette foi nous tienne lieu de justice devant lui, il veut nous l'imputer à justice" (Confession d'Augsbourg -- supra)?
Les deux doctrines s'excluent et se condamnent mutuellement! Et nous savons que Rome est dans l'erreur.
Dans ce contexte, la seule question œcuménique pertinente et sincère est:
Rome va-t'elle se rétracter et rentrer dans le giron de l’Église (comme c'est son devoir de le faire!) en dénonçant les canons du concile de Trente, et en adoptant la Confession d'Augsbourg?
4. Réponse de la "déclaration conjointe":
Le dialogue œcuménique est ainsi pensé que cette question fondamentale n'est... pas du tout posée!
Tout se passe comme si personne (et surtout pas la Rome auto-proclamée infaillible!) ne s'était jamais trompé! Ou (pour être plus exact) comme si personne n'avait l'intention d'admettre loyalement ses erreurs pour les rétracter.
Le long dialogue (auquel la "déclaration" renvoie sans cesse, d'autant qu'elle n'est pas une déclaration autonome cf. §§ 3 et 6) aboutit à énoncer une prétendue "compréhension commune" (mais non-exhaustive!) de la justification (§ 5).
Malgré un "dépassement des condamnations", le passé d'aucune des traditions ecclésiales n'est désavoué (§7)!
Et ainsi, est développé un long exposé, dans lequel deux doctrines contradictoires sont astucieusement formulées sous les mêmes phrases.
Prodigieuse œuvre diplomatique; chef-d’œuvre de rhétorique, sans doute. Mais pour la foi, cette déclaration est aussi inutile (et même nuisible) qu'elle est sophistiquée!
Car enfin, après avoir lu cette astucieuse déclaration, l'âme croyante reste sur sa faim. Elle ne peut s'empêcher de demander, avec la candeur qui la caractérise: faut-il donc conclure, avec le concile non-désavoué de Trente, que la foi est simplement le commencement de la Justification, ou faut-il conclure, avec la confession non-désavouée d'Augsbourg, que toute notre justice consiste dans la foi?
Ou encore: le concile de Trente a-t-il raison d'affirmer que le "sacrement" de la confession est aussi nécessaire pour les péchés commis après le baptême, que le baptême ne l'est pour les péchés commis avant d'être devenu chrétien?
Ici, concrètement, pour et dans sa vie spirituelle, l'âme croyante demande laquelle des deux traditions ecclésiales il faut retenir -- et laquelle il faut rejeter. Mais la déclaration conjointe refuse de donner une réponse satisfaisante à cette question. Elle veut qu'un carré entre dans un cercle et que plus personne ne se soucie de cette vieille affaire!... du moins, pour l'instant.
Conclusion:
Loin de servir l'intérêt de la vérité, la déclaration conjointe l'obscurcit et la dissimule. Ce faisant, elle est sacrilège et dangereuse pour les âmes.
Mais le danger ne s'arrête pas là.
Car, noyer le poisson (comme le fait très bien la déclaration) ne peut être qu'une étape dans la construction œcuménique.
Une étape pour laisser croire que "500 ans de contentieux sont terminés".
Une étape pour que "ceux d'en face" baissent la garde.
Que les protestants ouvrent leurs bras, comme les Troyens ont ouvert leurs portes à leurs adversaires.
Mais, tôt ou tard, pour nourrir la foi (ou la contrefaçon de foi) des âmes, il faudra que quelqu'un repêche le poisson: que quelqu'un donne un commentaire autorisé de ce document. C'est que tout ce brave peuple, étourdi et intimidé par une si fine rhétorique, aura besoin d'un guide pour percevoir, entre les lignes du texte, ce que dit réellement et officiellement ce texte...
Qui finira par expliquer, au nom de tous, ce que veut dire ce document?
Sera-ce la CMER, pitoyable organisation née en 2010 (et inconnue même par la plupart des Réformés) qui nourrira les romanistes de sa compréhension?
Ne sera-ce pas plutôt Rome, dont la prétention à l'infaillibilité n'a d'égale que sa visibilité?...
La déclaration conjointe n'apparaît alors que comme un outil de vassalisation des "protestants" (et, à plus long terme: leur absorption?): les membres de "communautés ecclésiales" (dixit Benoit XVI) sont priés d'admettre que plus rien ne les sépare fondamentalement de Rome (en tout cas, en ce qui concerne l'article capital de la Justification). Anesthésier les âmes et ouvrir la porte des "Églises": voilà pour le pouvoir de la CMER sur les âmes, à travers ses Églises membres. Mais le pouvoir de la CMER s'arrêtera là. La CMER ne fait et ne fera pas le poids face à Rome.
Rome qui n'a renoncé ni à son conciliabule de Trente, ni à ses Indulgences, ni à son catéchisme. Comme des grenouilles face à un serpent, nos braves petits "Réformés", désarmés par la CMER, apprennent à faire confiance aux membres de ce magistère qui a condamné la doctrine protestante et qui cueillera les naufragés des "grandes Églises historiques", après que celles-ci aient renoncé à proclamer un Évangile clair et sans concession.
Mais cette vassalisation (puis dilution) est-elle un accident?
Il pourrait sembler qu'elle résulte d'une volonté morbide et concertée, par les cadres de certaines "Églises" Réformées, de venir se prosterner devant celui qu'ils appellent déjà "leur pape".
Bucerian
4. Réponse de la "déclaration conjointe":
Le dialogue œcuménique est ainsi pensé que cette question fondamentale n'est... pas du tout posée!
Tout se passe comme si personne (et surtout pas la Rome auto-proclamée infaillible!) ne s'était jamais trompé! Ou (pour être plus exact) comme si personne n'avait l'intention d'admettre loyalement ses erreurs pour les rétracter.
Le long dialogue (auquel la "déclaration" renvoie sans cesse, d'autant qu'elle n'est pas une déclaration autonome cf. §§ 3 et 6) aboutit à énoncer une prétendue "compréhension commune" (mais non-exhaustive!) de la justification (§ 5).
Malgré un "dépassement des condamnations", le passé d'aucune des traditions ecclésiales n'est désavoué (§7)!
Et ainsi, est développé un long exposé, dans lequel deux doctrines contradictoires sont astucieusement formulées sous les mêmes phrases.
Prodigieuse œuvre diplomatique; chef-d’œuvre de rhétorique, sans doute. Mais pour la foi, cette déclaration est aussi inutile (et même nuisible) qu'elle est sophistiquée!
Car enfin, après avoir lu cette astucieuse déclaration, l'âme croyante reste sur sa faim. Elle ne peut s'empêcher de demander, avec la candeur qui la caractérise: faut-il donc conclure, avec le concile non-désavoué de Trente, que la foi est simplement le commencement de la Justification, ou faut-il conclure, avec la confession non-désavouée d'Augsbourg, que toute notre justice consiste dans la foi?
Ou encore: le concile de Trente a-t-il raison d'affirmer que le "sacrement" de la confession est aussi nécessaire pour les péchés commis après le baptême, que le baptême ne l'est pour les péchés commis avant d'être devenu chrétien?
Ici, concrètement, pour et dans sa vie spirituelle, l'âme croyante demande laquelle des deux traditions ecclésiales il faut retenir -- et laquelle il faut rejeter. Mais la déclaration conjointe refuse de donner une réponse satisfaisante à cette question. Elle veut qu'un carré entre dans un cercle et que plus personne ne se soucie de cette vieille affaire!... du moins, pour l'instant.
Conclusion:
Loin de servir l'intérêt de la vérité, la déclaration conjointe l'obscurcit et la dissimule. Ce faisant, elle est sacrilège et dangereuse pour les âmes.
Mais le danger ne s'arrête pas là.
Car, noyer le poisson (comme le fait très bien la déclaration) ne peut être qu'une étape dans la construction œcuménique.
Une étape pour laisser croire que "500 ans de contentieux sont terminés".
Une étape pour que "ceux d'en face" baissent la garde.
Que les protestants ouvrent leurs bras, comme les Troyens ont ouvert leurs portes à leurs adversaires.
Mais, tôt ou tard, pour nourrir la foi (ou la contrefaçon de foi) des âmes, il faudra que quelqu'un repêche le poisson: que quelqu'un donne un commentaire autorisé de ce document. C'est que tout ce brave peuple, étourdi et intimidé par une si fine rhétorique, aura besoin d'un guide pour percevoir, entre les lignes du texte, ce que dit réellement et officiellement ce texte...
Qui finira par expliquer, au nom de tous, ce que veut dire ce document?
Sera-ce la CMER, pitoyable organisation née en 2010 (et inconnue même par la plupart des Réformés) qui nourrira les romanistes de sa compréhension?
Ne sera-ce pas plutôt Rome, dont la prétention à l'infaillibilité n'a d'égale que sa visibilité?...
La déclaration conjointe n'apparaît alors que comme un outil de vassalisation des "protestants" (et, à plus long terme: leur absorption?): les membres de "communautés ecclésiales" (dixit Benoit XVI) sont priés d'admettre que plus rien ne les sépare fondamentalement de Rome (en tout cas, en ce qui concerne l'article capital de la Justification). Anesthésier les âmes et ouvrir la porte des "Églises": voilà pour le pouvoir de la CMER sur les âmes, à travers ses Églises membres. Mais le pouvoir de la CMER s'arrêtera là. La CMER ne fait et ne fera pas le poids face à Rome.
Rome qui n'a renoncé ni à son conciliabule de Trente, ni à ses Indulgences, ni à son catéchisme. Comme des grenouilles face à un serpent, nos braves petits "Réformés", désarmés par la CMER, apprennent à faire confiance aux membres de ce magistère qui a condamné la doctrine protestante et qui cueillera les naufragés des "grandes Églises historiques", après que celles-ci aient renoncé à proclamer un Évangile clair et sans concession.
Mais cette vassalisation (puis dilution) est-elle un accident?
Il pourrait sembler qu'elle résulte d'une volonté morbide et concertée, par les cadres de certaines "Églises" Réformées, de venir se prosterner devant celui qu'ils appellent déjà "leur pape".
Bucerian
Commentaires
Voici la version officielle de la déclaration conjointe, sur le site du Vatican :
http://www.vatican.va/roman_curia/pontifical_councils/chrstuni/documents/rc_pc_chrstuni_doc_31101999_cath-luth-joint-declaration_fr.html
Disons, peut-être plus précisément que vous ne l'avez fait, que le plus important, du point de vue de biens des prescripteurs de consensus "oecuménique", est que les catholiques et les protestants se soumettent ensemble
- à la position de principe d'après laquelle les confessions chrétiennes sont réductibles à des opinions collectives, adaptatives ou évolutives,
et
- à la position de principe selon laquelle la vérité objective inspirée par la révélation divine n'existe pas, que ce soit dans l'ordre de la foi ou dans celui des moeurs.
Le but de la manoeuvre n'est donc pas que les catholiques deviennent peu à peu des protestants qui s'ignorent, ni que les protestants deviennent plus ou moins des catholiques qui s'ignorent, mais que les uns et les autres deviennent des croyants à la fois chrétiens et postmodernes, ce qui est parfaitement contradictoire, puisqu'un chrétien prend au sérieux le poids des mots, le sens des mots, dans l'Ecriture et dans la Tradition, alors qu'un postmoderne soumet le poids des mots et le sens des mots à tel contexte, à tel devenir, à ses desiderata, à ses revendications, à sa sensibilité, à sa subjectivité, etc.
Il est objectivement vrai que le catholicisme tridentin et le protestantisme luthérien, si les mots ont tout leur poids et tout leur sens, ne sont pas conciliables, notamment en ce qui concerne la justification, mais nous sommes en présence de clercs qui ont décrété que la déconstruction et le dépassement des origines et des conséquences des antagonismes irréductibles les plus objectivement constatés, pour des raisons théoriques et historiques, constituent deux valeurs à la fois "chrétiennes" et compatibles avec le monde contemporain.
C'est avec le même mode de raisonnement, postmoderne, que l'on en arrive à vous expliquer, le plus "sérieusement" du monde, qu'il est impossible que telle déclaration, commune ou conjointe, soit contradictoire au point d'être dysfonctionnelle, puisqu'elle est à la fois bien intentionnée, dans l'esprit de ses auteurs, et bien appropriée à l'évolution des mentalités...
(à suivre)
Quel est le but de la manoeuvre ? Manipuler et neutraliser :
- manipuler ceux qui ne s'opposent pas à cette tentative de réconciliation entre le mode de raisonnement, notamment chrétien, le plus normatif et le plus objectif qui soit (en ce qui concerne le poids des mots et le sens des mots) et le mode de raisonnement postmoderne (légitimateur du relativisme et du subjectivisme, en religion et en morale), cette tentative de réconciliation étant, en fait, une tentative de subordination de la plus élémentaire honnêteté intellectuelle au mode de raisonnement le plus suiviste qui soit,
et
- neutraliser ceux qui s'opposent à cette tentative de réconciliation, ou plutôt de subordination, en donnant à croire que le point de vue des récalcitrants est dépassé, nostalgique, passéiste, périmé, par ce qu'il y a de plus récent, "donc" de plus intelligent et de plus intéressant, en philosophie et en théologie, et en donnant à croire que ce point de vue est caractérisé par un défaut ou un manque de charité, de compréhension, de coopération "oecuméniques".
Nous ne sommes pas en présence d'hérétiques, mais en présence d'irénistes systématiques, et nous ne sommes pas non plus en présence d'un véritable oecuménisme, mais en présence d'un unanimisme, épistémique, philosophique, théologique, axiologique, par cercles concentriques, le premier cercle étant formé par les chrétiens, le deuxième cercle étant formé par les croyants, le troisième cercle étant formé par les être humains.
Donc, d'après certains, peu importe que la déclaration Dominus Iesus, en l'an 2000,
http://www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_doc_20000806_dominus-iesus_fr.html
laisse entendre à peu près le contraire de ce que laisse entendre la déclaration conjointe de l'an 1999, sur la possibilité de procéder à la déconstruction puis au dépassement des antagonismes les plus structurants, entre les confessions chrétiennes, car ce qui importe est que les fidèles des uns et des autres aient de moins en moins de réflexes, et de moins en moins de réflexion, pour oser contester et pour pouvoir contester cette transformation de l'oecuménisme en une supercherie ou, en tout cas, en une surenchère unanimiste.
Cette surenchère unanimiste ne serait, par ailleurs, certainement pas autorisée par les responsables religieux concernés, si elle permettait aux catholiques et aux protestants de combattre, ensemble, d'une manière explicite et spécifique, la mentalité dominante, postmoderne, relativiste et subjectiviste, qui sévit aujourd'hui dans l'ordre du croire et dans celui de l'agir.
Je le dis autrement : nous sommes aujourd'hui en présence de clercs, au sens large, qui sont persuadés que la prise en compte de la sincérité des uns et des autres (les chrétiens, les croyants, les êtres humains), notamment en religion, est infiniment plus importante que celle de la rectitude et de la véracité de la foi théologale, en Dieu, Père, Fils, Esprit. Tout cela risque fort de finir par un christianisme "inclusif", sans Credo ni Décalogue...
Bonne journée.
Un lecteur.