Ecriture et Tradition?



Prenez aussi le casque du salut, et l'épée de l'Esprit, qui est la parole de Dieu.

St Paul aux Ephésiens, 6. 17



Le Christianisme confessant, fidèle à Dieu --contre toutes les pressions des hommes qui veulent se substituer à Son Autorité--, est attaché de longue date au principe dont parlait déjà Thomas d'Aquin au Moyen Âge: celui du Sola Scriptura, ou, traduit en langue française: l'Ecriture seule.

Ce principe veut en effet que, tout comme une Constitution est pour un Etat sa norme ultime (à la lumière de laquelle les lois du pays devront se conformer sous peine d'être mises de côté), de même, l'Ecriture sainte, Parole de Dieu, est pour l'Eglise la norme ultime à la lumière de laquelle les articles de foi, les dogmes, les crédos, mais aussi les coutumes et la conduite morale des fidèles, doivent être examinés et (dans le cas où se présenterait une telle nécessité), réformés (c.f. Confession de La Rochelle, art 5).

Or il s'avère que ce principe est contesté par la voix de différents catholiques romains, ainsi qu'en témoigne par exemple l'article publié voici quelques temps par le très zélé "VexillumRegis", qui a consacré plusieurs textes contre un certain nombre de positions protestantes...
Nous tacherons ici, puisque nos principes sont attaqués et mis en doute, d'en faire l'apologie, et de montrer qu'ils sont conformes à l'Ecriture, et même, qu'ils sont les seuls valides.

Mais nous devons premièrement noter que l'article en question semble parler pêle-mêle de traditions non-scriptuaires et restées orales depuis les apôtres, avec une autre conception de tradition, qui serait quant à elle une sorte de surgissement continu, dans l'Eglise du Christ, de nouvelles révélations. C'est en tout cas l'impression que nous font ces deux assertions:
Car les Écritures sont formelles sur ce point : elles ne renferment pas l’ensemble de l’enseignement que le Christ prodigua au cours de ses années de prédication (= Tradition ancienne parallèle à l'Ecriture)
Et:
La sola scriptura a cet effet pervers de renfermer la puissance de l’Esprit Saint dans les seules Écritures, niant de ce fait son action dans le temps, où il ne cesse de guider l’Église dans la plénitude de la vérité.

Certainement les confusions suviendront-elles rapidement dans l'esprit du lecteur si nous ne faisons pas d'entrée de jeu les distinctions nécessaires sur le mot "tradition".

Ainsi, nous distingons:

1) la Tradition, au sens ou l'entend par exemple St Irénée dans un passage du IIIe Livre contre les Hérésies, et qui consiste dans les artcles de foi aujourd'hui exposés dans le Symbole. Cette foi est immuable, toujours sembable à elle-même (même si l'intelligence que les hommes peuvent en avoir peut varier). C'est ainsi que nous lisons sous la plume de St Jude, que "la foi a été transmise aux saints UNE FOIS POUR TOUTES" (Jd 3)

2) A côté, il y a un autre sens à ce mot de tradition, et qui consiste en une sorte de gnose verbale subsistant à côté de l'Ecriture sainte, comme l'histoire de st Luc peingnant la Vierge à l'enfant, le nom des mages, l'idée qu'il faille se tourner dans telle ou telle direction pour prier, l'assomption de la Vierge, etc;
autant de doctrines qui, faute d'avoir un fondement biblique, sont justifiées par l'invocation d'une tradition verbale, dont nul ne connaît sans doute la liste exact des secrets...

Or, il doit bien être entendu ici que le Protestantisme n'a JAMAIS nié la Tradition (au premier sens décrit ici), et que s'il a remis à sa place la tradition théologique de l'Eglise (sous l'autorité de l'Ecriture, sans quoi celle-ci ne serait juge de rien du tout!), il ne s'est véritablement attaqué qu'à la seconde acceptation de tradition, ou plutot, aux traditions ouvertement extra-scriptuaires (et surtout: anti scripturaires) ceci à bon droit, comme nous le verrons.
Examinons à présent le contenu de l'article de V.R.

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§ 1:

Les Saintes Lettres attestent l'existence de traditions mauvaises que Notre Seigneur Jésus-Christ rejette, ainsi que saint Paul (Mt XV, 1-3 ; Col II, 8, 22). Mc VII, 1-13 nous permet de préciser avec plus d’exactitude quelles sont ces traditions que l’on doit justement condamner. Il s’agit des traditions pharisaïques, c’est-à-dire le ritualisme excessif qui, en suivant à la lettre les prescriptions les plus méticuleuses, en oublie l’essentiel, à savoir la glorification de Dieu et l’assistance à son prochain. « Ce peuple m’honore des lèvres, mais son coeur est loin de moi » ; ces propos d’Isaïe (XXIX, 13), sur lesquelles Jésus s’appuie, sont très claires : c’est l’hypocrisie qui est fustigée, cette hypocrisie qui va jusqu’à se servir des préceptes divins pour s’enrichir scandaleusement (Mc VII, 10-13). Voilà les traditions humaines qui doivent être rejetées avec fermeté, selon les prescriptions du Seigneur. Mais il faut faire immédiatement remarquer que d’autres traditions judaïques ont été approuvées, et pour ainsi dire canonisées par le Nouveau Testament (voir He XI, 37 : tradition selon laquelle le prophète Isaïe serait mort scié en deux par le roi impie Manassé ; Jude 9 : sur la destinée posthume du corps de Moïse).
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Ici, nous entendons qu'il ne faudrait condamner que certaines inventions humaines (celles qui détournent de la charité et ne sont que formalisme, voir, brigandage), tout en acceptant d'autres traditions.

Questions:
Luther a-t-il eu tort, alors, de condamner les indulgences vendues pour prix d'argent, pratique qui était clairement vénale?
Luther a-t-il eu tort de condamner les pélerinages en ce que, avec l'argent nécessaire à cette ''pratique religieuse", on ferait mieux de s'occuper des pauvres autours de soi?

On aurait aucun mal à constater, en poursuivant ainsi, que le Protestantisme n'a fait que condamner des "traditions" nuisibles aux corps et aux âmes, donc contraires à la Paroles de Dieu, et qui tombaient ainsi sous le coup de ces paroles du Christ:

6 Et ainsi vous avez anéanti le commandement de Dieu par votre tradition. 7 Hypocrites! Ésaïe a bien prophétisé à votre sujet, lorsqu'il a dit: 8 Ce peuple s'approche de moi de la bouche et m'honore des lèvres; mais leur cœur est bien éloigné de moi. 9 Mais ils m'honorent en vain, en enseignant des doctrines qui sont des commandements d'hommes.
(Matthieu 15)

Mais VR semble estimer que Jude 9 donne raison à sa théorie: l'Ecriture n'est pas la seule autorité ultime en matière de foi et de morale, il y a aussi la tradition orale.
Soit. Admettons que ce qui a été cru et affirmé parmi les pharisiens soit aussi vrai que ce qui est écrit dans le reste de l'Ancien Testament: alors VexillumRegis doit aussi tenir pour une vérité révélée qu'un géant s'est caché sur le toit de l'arche pendant le déluge, ou que cela porte la mauvaise chance de regarder un arc-en-ciel, puisque c'est écrit dans le Talmud!
Et s'il dit que non, alors nous lui demandons:
comment savons nous donc que, par contre, l'éhistoire de la dispute du corps de Moïse est vraie?
Parce que cela est écrit dans l'épître de Jude, la Bible?
Mais alors, c'est bien le sola scriptura qui est ici attesté, et de la bouche même d'un catholique romain!

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§ 2 :

Car l’Écriture atteste qu’il existe une tradition sainte, une tradition chrétienne et authentique, qui vient de Dieu, et que l’Église est chargée de garder soigneusement et d’enseigner. Cette tradition divine est fondée sur les promesses du Christ : « J'ai encore beaucoup de choses à vous dire; mais vous ne pouvez les porter à présent. Quand le Consolateur, l'Esprit de vérité, sera venu, il vous guidera dans toute la vérité» (Jn XVI, 12-13 ; cf. aussi Jn XIV, 26). Car les Écritures sont formelles sur ce point : elles ne renferment pas l’ensemble de l’enseignement que le Christ prodigua au cours de ses années de prédication (Jn XVI, 12 ; Jn XXI, 25). Après que le Christ fut ressuscité des morts, il s’entretint quarante jours avec ses apôtres au sujet du royaume de Dieu (Ac I, 3) : trouve-t-on consigné dans les Écritures, autrement que dans des fragments éparpillés, cet enseignement que l’on devine fondamental ? - S. Paul, qui rapporte lui-même une parole du Christ que l’on ne trouve point dans les Évangiles (Ac XX, 35), demande avec fermeté à ses disciples de garder les enseignements qu’ils ont reçus de lui et de les transmettre à leur tour (2 Th II, 15 ; 2 Tm II, 2 ; 1 Co XI, 2 ; 1 Th II, 13 ; 2 Tm I, 13-14). C’est de cette manière que l’Évangile a d’abord été annoncé : par la prédication et l’enseignement d’homme à homme, et non par la diffusion écrite (2 Co III, 2-3). Le support écrit n’est intervenu qu’après, et peut d’ailleurs être considéré comme une simple formalisation de la tradition orale (Lc I, 1-4).
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Ce deuxième paragraphe s'annonce riche en considérations sur notre sujet. Nous y répondrons néanmoins point par point.
Ainsi, VR affirme qu'il existe une Tradition chrétienne et authentique, que vient de Dieu, et que l'Eglise doit garder. Cela, comme il a été dit plus haut déjà, le Pro-testantisme ne le nie pas. C'est même tout le contraire, car c'est justement cette Tradition que nous entendons pro-tester (témoigner) devant Dieu et les hommes.
Néanmoins notre chemin s'écarte de celui de VR lorsque celui-ci affirme que cette tradition n'est pas pleinement consignée dans l'Ecriture; du moins, pas suffisamment.
Pour fonder une telle affirmation, l'auteur prend à témoin le Christ, ou plutot ses paroles (Jean 16):
« J'ai encore beaucoup de choses à vous dire; mais vous ne pouvez les porter à présent. Quand le Consolateur, l'Esprit de vérité, sera venu, il vous guidera dans toute la vérité»
Mais nous objectons, avec J. Calvin:
"Je confesse que les apôtres étaient encore rudes et grossiers, quand notre Seigneur disait cela. Mais cette ignorance était-elle encore en eux quand ils ont réduit leur doctrine par écrit, en sorte qu'il ait fallu après suppléer de vive voix ce qu'ils avaient oublié, ou laissé en arrière par faute d'intelligence? Mais au contraire, puisque nous savons qu'ils étaient déjà menés par l'Esprit en toute la vérité, quand ils ont composé ce que nous avons de leurs écrits, qu'est-ce qui a empêché qu'ils n'aient là compris une parfaite connaissance de la doctrine évangélique?" (Institution Chrétienne, IV. VIII. 14).
Quand à Jean 14, que VR cite également, ne va-t-il pas dans le sens de la doctrine protestante, en ce que le Christ y atteste que l'office de l'Esprit n'est pas d'innover de nouvelles doctrines, mais de remettre au contraire à l'esprit des siens la doctrine du Christ?
Et il est vain d'amener ici le 21e chapître de l'Evangile Johannique, comme le fait VR, afin de montrer que les Ecritures (je cite) "ne renferment pas l’ensemble de l’enseignement que le Christ prodigua au cours de ses années de prédication".
En effet, même si Jean 21. 25 disait que l'Evangile de St Jean ne renferme pas toute la doctrine du Christ, resterait à prouver qu'il en va de même de l'ensemble de l'Ecriture.
Et si l'on voulait prouver cela par le fait qu'il est dit que tous les livres qu'on pourrait écrire n'y parviendraient encore pas, alors il nous semble bien que toutes les langues du monde n'auraient pas non plus la capacité de tout en dire (tant pis pour la tradition orale...)
Mais mettons toutes ces considérations superflues de côté, et voyons ce que dit vraiment le passage allégué:

25 Il y a encore beaucoup d'autres choses que Jésus a faites, et si elles étaient écrites en détail, je ne pense pas que le monde même pût contenir les livres qu'on en écrirait. Amen.

Voici qui, semble-t-il, est très différent de ce que dit VexillumRegis. Car l'Evangéliste considère que l'activité du Christ a été telle qu'on ne pourrait pas tout en dire, et encore moins dans le détail. En cela, il ne fait d'ailleurs que redire ce qu'il a déclaré un chapître plus haut (20.30):

30 Jésus fit encore en présence de ses disciples plusieurs autres miracles, qui ne sont pas écrits dans ce livre.

Voici donc qui est clair: on ne trouve pas dans l'Ecriture tous les miracles de Jésus. Mais en quoi l'excellence de notre doctrine est-elle amoindrie du fait que nous ignorons la guérison de tel paralytique ou tel lépreux?
En rien du tout!

Quand à ce que dit VR par la suite, ce n'est pas sans surprise que nous l'apprenons: Jésus s'est entretenu 40 jours après sa résurrection avec ses disciples. Il les a instruits, et, dans l'Ecriture, nous n'avons de cet enseignement fondamental que des "fragements éparpillés".

Eh bien, nous disons nous que ce qu'il appelle des "fragements éparpillés", nous pouvons être certains qu'ils sont assez abondants pour nous instruire suffisamment dans la piété. Et VexillumRégis voudrait-il le nier qu'il ne pourrait jamais le prouver, ainsi que nous le verrons plus bas (cf: à la conclusion de ce paragraphe).
Mais ici, commençons par peser la valeur des passages cités par VR pour nous convaincre que l'on ne trouve pas tout dans l'Ecriture:
Actes 20.35: St Paul cite une parole de Jésus inconnue des 4 évangélistes.
Nous répondons: VR, voir même le pape de Rome, est-il capable de citer une seule phrase de Jésus qui ne se trouve pas dans l'Ecriture, ainsi que l'a fait St Paul?
Ne sont-ils pas plutot contraints de chercher dans l'Ecriture (que ce soit sous la plume des évangélistes ou d'un apôtre, comme Paul en Actes 20) pour savoir quoique ce soit de certain à ce sujet?
Et dans ce cas, ne sont-ils pas les plus mal placés pour critiquer le sola scriptura?

Certes, St Paul exhorte explicitement les Chrétiens de Thessalonique de garder les traditions qu'il leur a transmises, par écrit comme de vive voix (2Thessaloniciens 2. 15).
Qu'est-ce que cela prouve contre nous?
Rien du tout.
En effet, si la Bible ne se composait que des deux épîtres de St Paul aux Théssaloniciens, on devrait considérer que la première épître ne contient pas tout l'enseignement divin.
Mais qu'en est-il quand on sait qu'en plus des 4 Evangiles et du livre des Actes, nous avons dans le Nouveau Testament 13 épître de S. Paul, l'épître aux Hébreux, celle de S. Jacques, plus deux lettres de S. Pierre, 3 épîtres de S. Jean, une de Jude et enfin l'Apocalypse?
Tout cela réuni avec l'Ancien Testament est-il d'un même poid que la seule première épître aux Thessaloniciens?
En outre, quelles sont ces traditions auxquelles renvoie ici l'apôtre, sinon ce qu'il dit dans la même épître --et qu'on peut trouver ailleurs dans l'Ecriture--, savoir des assertions pour une foi et une vie saines (2Thess 3. 6, ss; 1 Thess 4. 1, etc;)?!
Or, S. Paul fait beaucoup d'assertions morales et doctrinales, que l'on ne trouve certes pas toutes dans la première épître, mais que l'on trouve ailleurs en l'Ecriture, et dont (par exemple) la Didachè (ou: "Doctrine du Seigneur transmise aux nations par les douze Apôtres") parle --en tout cas pour la morale-- en long et en large, sans rien nous apprendre de plus que ce qui est connaissable déjà par l'Ecriture. Ainsi, 2 Thessaloniciens 2. 15 met peut-être à mal toute idée de "sola thessalonica"; mais le "sola scriptura", lui, reste bien debout.

Voyons manitenant ce qui concerne les traditions doctrinales pouvant être comprises par 2 Thessaloniciens 2. 15.
Plus exactement, voyons combien la chose est fortement considérée en un autre passage qu'amène VR, savoir le propos de St. Paul dans sa première aux Corinthiens (11. 2):
Frères, je vous loue de ce que vous vous souvenez de tout ce qui vient de moi, et de ce que vous retenez mes instructions telles que je vous les ai données.
Voici, selon Vexillum, la démonstration qu'il y a une tradition extra-scripturaire. Sauf que...
Un exemple de ces instructions se trouve donné plus bas, au verset 23. Et que révèle-t-il?
La Cène!

Car pour moi, j'ai reçu du Seigneur ce que je vous ai aussi enseigné; c'est que le Seigneur Jésus, la nuit qu'il fut livré, prit du pain;

Si c'est censé être là un exemple de doctrine salutaire ignorée des Ecritures.......
A ce propos, nous pensons devoir attirer ici l'attention de VexillumRegis sur le fait que la tradition transmise (d'abord) par oral par st Paul, chose qu'il souhaite voir gardée telle qu'elle lui a été transmise, et bien son Eglise (à VR) ne s'est pas gênée pour la transgresser.
Car le Christ (dans la Cène) a donné le pain et le vin à tous ses disciples, et St Paul le rappelle en ce que toute l'assemblée de Corinthe communiait sous ces deux espèces (1Co 11.26 --chose qui s'est perpétrée en continu longtemps après encore, et même jusqu'à nos jours chez les Orientaux). Cela, évidemment, est une pratique respectueuse de la tradition vénérable, et qui s'appui sur ces paroles de NSJC (au sujet de la coupe): buvez en tous! (Matthieu 26. 27).
Or il s'avère que le Pape de Rome ne s'est pas géné pour priver les fidèles de la coupe (ce fut, d'ailleurs, un grand sujet de dispute lors de la Réforme. Voir la Confession d'Augsbourg, art. 22).

"LES PAROLES S'ENVOLENT, LES ECRITS DEMEURENT", a-t-on coutume de dire. Si donc, là où il avait des écrits pour lui faire obstacle, le pape ne s'est pas géné pour altérer la tradition (il en va de la communion sous les deux espèce comme du célibat des pasteurs!), comment lui fera-t-on confiance sur des sujets où il n'y aurait aucun écrit pour vérifier ses dires???
Nous voyons en tout cas que le Protestantisme peut donc se targuer d'avoir honoré la tradition apostolique mille fois plus en ce point (et bien d'autres encore!) et ce (vous allez être surpris!) grâce à l'Ecriture seule, qui, fragmentaire (obsolète?) pour les uns, n'en restent pas moins puissantes pour nous instruire en toutes choses!

Ensuite, VR nous donne sa conception des choses sur la base de 1 Thessaloniciens 2. 13: les Apôtres auront enseigné l'Evangile de vive voix, puis ils auront écrit certaines de ces doctrines.
Mais, je vous prie, de quel ''message" nous parle l'apôtre en 1 Thess 2.13, sinon de l'Evangile, lequel il expose soigneusement dans l'ensemble de ses épîtres, de communion avec les autres Apôtres (cf 1 Corinthiens 15. 1-11)?
Alors, il est évident ici que tous les efforts de VexillumRegis (et de ceux qui partagent sa pensée sur la base des mêmes textes) s'éffondrent tel un chateau de cartes; car il n'a pas prouvé que la Parole de Dieu proclamée de vive voix par les Apôtres n'est pas maintenant suffisamment contenue dans les livres canoniques de la Sainte Ecriture.
Et 2 Timothée 1. 13-14 ne fait rien non plus contre nous; car en exposant de quelle manière Timothée a été instruit dans la foi (et où il peut trouver la nourriture de celle-ci), St Paul lui réduit le souvenir des Ecritures saintes (2Tim 3. 14-16).

Enfin, VR pense démontrer par Luc 1. 1-4 que l'enseignement apostolique, principalement oral, "déborde" l'Ecriture qui n'en aura "canalisé" qu'une partie infime.
C'est ce que nous entendons de ces paroles (dans le contexte du texte que nous réfutons): Le support écrit n’est intervenu qu’après, et peut d’ailleurs être considéré comme une simple formalisation de la tradition orale.
En tant que protestants, nous répondrons ici: "non pas simple formalisation de la tradition orale", mais nécessaire authentification.
Car ce que dit St Luc ici est très clair:

1 Plusieurs ayant entrepris d'écrire l'histoire des choses dont la vérité a été pleinement établie parmi nous;
2 Selon que nous les ont transmises ceux qui dès le commencement les ont vues eux-mêmes, et qui ont été les ministres de la Parole;
3 J'ai cru aussi, très excellent Théophile, que je devais te les écrire par ordre, moi qui les ai toutes examinées avec soin;
4 Afin que tu reconnaisses la certitude des choses dont tu as été instruit.

Or, si les auteurs sacrés ont mis par écrit la doctrine chrétienne afin d'apporter aux ouailles de l'Evangile "la certitude des choses dont ils ont été instruits" (faire le tri, ainsi, d'avec le faux), alors il est bien évident qu'il faut se garder de croire ce qui n'est pas ainsi authentifié. Ou alors, le travail des auteurs biblique aura été bien vain, et surtout: le canon scripturaire sera parfaitement inutile.
Ainsi, puisqu'il a été jugé bon et utile, par Dieu, de garder la vérité par le moyen des Ecritures (Proverbes 22.1 9- 21; Luc 1. 3-4; Romains 15 .4, Matthieu 4. 4-7-10; etc;) et de nous attester ainsi en le fixant la vérité de l'enseignement prodigué, notre devoir est de recourir à cette Ecriture pour, justement, vérifier ce que nous disent les pasteurs et docteurs (dont on sait qu'ils peuvent individuellent et collectivement, être infidèles -- Actes 20. 29; 2Pierre 2, etc;)

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§ 3 :

La question n‘est donc pas : sola scriptura ou Tradition ? mais bien : quelle Tradition ? - Car le principe de la sola scriptura n’a absolument aucun fondement scripturaire sérieux. Aucun des passages habituellement allégués pour soutenir ce quasi-dogme (2 Tm III, 16-17 ; Jn V, 39-40 ; Rm XV, 4) ne dit, même implicitement, que l’Écriture est le seul fondement de la foi. La sola scriptura a cet effet pervers de renfermer la puissance de l’Esprit Saint dans les seules Écritures, niant de ce fait son action dans le temps, où il ne cesse de guider l’Église dans la plénitude de la vérité (Jn XVI, 12-13). Le seul véritable fondement de la foi formellement attesté par l’Écriture, c’est l’Église (1 Tim. III, 15 ; Lc X, 16 ; Mt XVIII, 17), édifiée sur le fondement des apôtres (Ep II, 19-20 ; Ap XXI, 14), dont le Christ est la pierre angulaire, et Simon-Pierre la pierre visible de la communion ecclésiale (Mt XVIII, 18). Car l’Église, le corps du Christ (Ep I, 22-23), est aussi le Temple du Saint-Esprit (ce Saint-Esprit promis par le Christ - « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation des siècles » Mt XXVIII, 20 - pour conduire son peuple dans la plénitude de la vérité), qui a été répandu en surabondance sur les apôtres le jour de la Pentecôte. Ces apôtres, qui ont recueilli l’intégralité de l’enseignement du divin Maître, ils l’ont ensuite transmis à leurs disciples (2 Tm II, 2), qui eux-mêmes l’ont enseigné à leur tour à leurs successeurs. Car ce sont les évêques, en tant que successeurs des apôtres, qui ont été chargés de « garder le bon dépôt » de la foi (2 Tm I, 14 ; 1 Tm VI, 20) ; ce sont eux qui ont reçu le « don spirituel » (1 Tm IV, 14), le « don de Dieu » (2 Tm I, 16), lors de leur consécration à l’épiscopat, par l’imposition des mains. Voilà où elle se trouve infailliblement, la pure Tradition qui vient de Dieu, et que Paul nous demande de garder avec soin : dans le corps des évêques en communion avec le successeur de Pierre !
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Cet ultime assaut de VR contre la position protestante, assaut qui prend appui sur tout ce que nous avons réfuté plus haut (et qui se présente d'office comme dépourvu de poids), nous paraît le plus étrange de tous.
En effet, après avoir postulé une doctrine qui ne s'accorde pas avec l'existence du canon scripturaire ni avec sa vocation, VR rejette à la pelle tout ce qui est loin de s'accorder avec son propos (2 Tm III, 16-17 ; Jn V, 39-40 ; Rm XV, 4) et se contente de répéter pour (au moins) la troisème fois le propos de Jésus en Jean 16, au point que nous nous demanderions presque s'il existe un autre verset dans l'Ecriture qui puisse appuyer la doctrine romaine...
Heureusement, VexillumRegis nous rassure par 1 Timothée 3, 15 ; Luc 10, 16 ; Matthieu 18. 17, selon quoi le seul véritable fondement de la foi serait l'Eglise...
A ce passage de la première à Timothée, nous répondrons ici avec Calvin:
"si la vraie Eglise est la colonne et le firmament de la vérité, il n'y a point de doute qu'il n'y a pas d'Eglise là où règnent la fausseté et le mensonge" (Inst Chrét IV. II. 1)
Ainsi, il est faux d'imaginer une Eglise qui ne peut érrer parce qu'elle a l'Esprit de Dieu, de sorte qu'elle ne cesserait de dire vrai même quand elle parlerait sans la Parole de Dieu.
Au contraire, Esprit de Dieu et Parole de Dieu ne sont pas séparables. C'est pourquoi, nous sommes tout à fait d'accord pour dire que l'Eglise ne peut pas errer sur les articles nécessaires au salut (cela, les Pères Réformateurs ne l'ont jamais nié) mais elle ne reste dans la vérité qu'à la condition d'écouter Dieu en Sa Parole, par laquelle l'Esprit la mène (Jean 14. 26).

Et le fondement des apôtres dont parle Paul en Ephésiens 2, il ne fait pas de doute que c'est leur doctrine qui est ainsi visée, si bien qu'on ne gagne rien par ce verset --puisqu'au contraire, il appert que ladite foi apostolique est compilée dans les Livres de l'Ecriture sainte.
Or il serait insuportable de prétendre que les Apôtres ont transmis à leurs disciples la foi Chrétienne comme s' il avait été dit (à ces disciples) autre chose que ce qu'on trouve dans l'Ecriture. Evidemment que les évêques doivent garder la foi et l'Eglise! Mais d'où et comment peut-on en déduire qu'ils ont pouvoir de contraindre les âmes à une foi qui n'exsiet pas dans la Parole de Dieu?
Et comment aussi peut on regarder les évêques et docteurs comme nécessairement fidèles à leur vocation et parfaitement dignes de confiance, quand St Paul lui-même dit qu'il s'infiltrera parmis eux des loups féroces (Actes 20. 29-30), et que St Pierre ne dit pas autre chose (2 Pierre 2)?
Quel évêque suivre alors, en cas de dispute entre un monothélite et un orthodoxe?
Quand l'un, évêque de Rome et pape, soutient qu'il n'y a qu'une volonté dans le Christ (Honorius Ier fut condamné pour cela, en tant que pape, par le troisième concile de Constantinople, c-à-d le 6e concile oecuménique), et qu'un moine soutient contre lui le contraire, que l'Ecriture ne suffit soi-disant pas pour éclairer le fidèle (Actes 17. 11???) et que la tradition orale semble muette ici?
Chacun devra donc se laisser aller à son intuition? Ou à suivre un évêque de Rome auquel il faut rester uni par principe, pour ne pas être le vilain schismatique de service?
Est-ce à cela que VexillumRegis veut nous réduire?

En vérité, VR doit bien sentir ici que sa tradition laissée à l'Eglise en plus de l'Ecriture ne peut en rien sauver l'unité de l'Eglise, car justement, il y a au moins deux Eglises qui se veulent respectueuses de la Tradition extra-scripturaire (Rome et Constantinople), et qui peuvent se prévaloir d'une succession continue d'évêques depuis les Apôtres, et le problème, c'est que ces deux communions sont divergentes et séparées depuis l'an 1054!
Alors, VR n'a plus qu'un rempart: qu'on soit indeffectiblement attaché, non pas seulement à la doctrine de l'Ecriture, mais avant tout et surtout au pape de Rome, suivant l'Ecriture et la tradition. Malheureusement pour lui, et comme on pouvait le prévoir, son téléphone arabe aura mal fonctionné: on n'a plus vent de sa doctrine à Constantinople!
Reste donc, pour fonder la papauté, le témoignage de l'Ecriture, et de l'Ecriture seule (sola scriptura!), aussi est-ce en bon protestant que notre ami doit disputer avec nous et avec l'ensemble de la chrétienté.
Grande victoire de Luther, n'est-ce pas?

Or il se trouve que jamais aucun Apôtre ni aucun ange n'a pu avoir une autorité telle qu'il puisse demander d'être cru sans le témoignage de l'Ecriture. Ainsi, St Paul, qui était aux païens ce que St Pierre était aux Juifs (Galates 2. 7), affirme qu'il devrait être tenu pour anathème s'il venait prêcher soudainement un autre Evangile que celui qui a été annoncé (Galates 1. 8-9). Il en va de même, donc, pour Pierre, et évidemment aussi de tous ses successeurs.
Ainsi donc, soit pape, soit moine, le seul glaive auquel le Chrétien peut recourir consiste en la Parole de Dieu (Eph 6. 17), qui est l'Ecriture sainte (Matthieu 4.4, etc;), Ecriture suffisante pour la connaissance de la vraie foi et de la morale (Psaume 12. 7; 19. 8-9; Jean 15. 15; Jean 20. 31; Actes 20. 20-21, 27 ; etc;) Ecriture à laquelle il ne faut ni ajouter, ni retrancher (Deutéronome 4. 2; 11. 32; Proverbe 30. 6; Apocalypse 22. 18-19, etc;).

Comment donc VR pourra-t-il établir la papauté avec l'Ecriture, et aboutir par elle à un raisonnement contraire à celui de l'Ecriture, exposé ci-dessus?
L'Ecriture nous dit-elle que l'Eglise a besoin d'un pape? Si oui, pourquoi ce ministère n'est-il pas mentionné dans la liste que donne St Paul aux Ephésiens (4. 11-12)?
Constrairement à ce que semble penser VexillumRegis, ce n'est pas Matthieu 18. 18 qui pourra fonder de telles prétentions en tout cas.

En fin de compte, ne reste plus à Rome qu'à demander d'être crue parce qu'elle l'a ainsi décrété, arbitrairement et sans apporter aucune raison valable, ni dans la Tradition (qu'elle n'a pas en commun avec Constantinople) ni dans l'Ecriture (dont elle confesse ne rien pouvoir établir sans l'apport de ladite tradition, qui s'avère insuffisante...!)
Nous plaignons un tel état d'insuffisance, mais le salut de nos âmes étant en jeu ici, nous n'avons pas l'intention de suivre aveuglément des hommes qui n'ont pour eux que leurs propres prétentions.

AUGUSTINUS

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