Dieu est amour: l'article de la Sainte Trinité
On nous fait souvent la remarque suivant laquelle le dogme Trinitaire serait trop spéculatif, trop froid et tout à fait inutile (pour ne pas dire nuisible), pour la foi du simple croyant.
L’Église des premiers siècles n'aurait (nous dit-on) pas connu cet article, dont les considérations sophistiquées ne seraient survenues que plus tard et que le Concile de Nicée (en 352) aurait scellé.
C'est ainsi qu'il semble plus sage à certains, plus authentique aussi, de rejoindre la doctrine arienne: un Dieu unique, rien de plus.
Jésus? Créature de Dieu!
L'Esprit saint? Force impersonnelle de Dieu.
Voilà où veulent nous conduire nos nouveaux docteurs...
Alors certes, nous devons bien confesser qu'en ne retenant qu'une partie de la vérité, on rendrait les choses plus simples (en apparence):
Dieu tiendrait tout entier dans nos cervelles!
Oui, mais voilà: cette démarche consisterait à défigurer la Vérité, à rendre inutile la Révélation, en forgeant un dieu-fils de la raison, une création humaine qui ne serait pas Dieu, autant le dire, donc: une idole que nous adorerions avec les païens! Est-ce là ce que doit faire l’Église chrétienne?
Ne devons nous pas au contraire être élevés par la Révélation divine, la garder scrupuleusement en en adorant le mystère, plutôt que de chercher à l'abolir de façon aussi sacrilège?
Nous pensons que si. D'ailleurs, nous tacherons ici d'établir que, pour quiconque admet, contemple et médite le mystère Trinitaire avec foi et douceur, le dogme de la Trinité n'est ni vain, ni superflu, ni même trop sophistiqué, mais qu'il s'agit tout simplement de l'affirmation Biblique suivant laquelle Dieu EST amour (1Jean 4. 8)
Nous verrons également que le dogme Trinitaire, pour être établi, ne nécessite pas des trésors d'imagination, mais qu'il découle au contraire de l'acceptation simple du donné scripturaire.
I. L'amour de Dieu manifesté à la croix
A la croix, en effet, nous est révélé l'amour de Dieu (Jean 3.16):
Dieu a tant aimé le monde, qu'il a donné son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse point, mais qu'il ait la vie éternelle.
Si le message ultime de certains "dieux" consiste à interdire aux hommes de manger tel met, ou de leur donner un droit positif implacable avec ordre de fonder un État théocratique ici bas, Dieu, notre Créateur et Sauveur, se révèle, Lui, en Jésus-Christ.
Dieu, celui qui est tel qu'on ne puisse rien penser de plus grand (Hébreux 6. 13 et ss //c.f. Proslogion, st Anselme de Cantorbury), se révèle dans le Fils (Hébreux 1.1-2; Jean 1.18).
Et voici ce que nous apprenons: Dieu est amour (1Jean 4.8).
Et l'amour --plus grande de toutes les vertus, selon l’Écriture (1Corinthiens 13.13)-- qui est révélé dans l’œuvre du Fils, est un amour correspondant à l'être tel qu'on ne puisse pas en penser de plus grand, savoir: un amour tel qu'il n'en existe pas non plus de plus grand (Jean 15.13):
Dieu aime des créatures déchues par leur propre faute, et qui, par toutes leurs offenses, sont dignes de sa seule colère. Il les aime, jusqu'au don de lui-même (Romains 5.6).
A ce titre, bien qu'elle ne puisse certainement mener personne à la foi salvatrice, il est à noter que nous avons surement dans la cohérence décrite ci-dessus une marque de la nature divine de la Révélation biblique, pouvant faire sentir son origine même à l'impie (Confession de Westminster 1. 5).
Nous avons donc posé que l'amour de Dieu est révélé à la croix (et, puisque Dieu est l'amour dont il aime, Dieu se révèle ici tel qu'il est: amour).
Mais cela soulève la question suivante:
Dieu aime-t-il parce que (et dès lors que) il a des créatures vers qui porter son affection (aimer = tendre vers), ou aime-t-il "au delà", en Lui-même, nécessairement et éternellement?
Si la réponse était la première, cela voudrait dire que Dieu est devenu amour en créant, n'étant de ce fait pas immuable, et donc, comme étant ce qui change, il ne serait pas Dieu. Car ce qui change, c'est ce qui a commencé d'être. Ce qui a commencé d'être, c'est ce qui a aussi une fin, tandis que Dieu est éternel, immuable, sans commencement ni fin.
Une autre solution consisterait à imaginer que l'objet de l'amour de Dieu est également éternel et nécessaire, en d'autres termes: que la création est divine, Dieu n'ayant donc pas eu la liberté de créer ou de ne pas créer.
Une création-divine, cela est du panthéisme. Le panthéisme ne s'accorde pas avec la Parole de Dieu.
Ces deux choses étant donc impossibles ( = Dieu changeant qui devient amour en créant et création de nature divine qui assure à Dieu d'aimer toujours sans changement), reste une troisième voie: celle du dogme Trinitaire.
Dieu aime éternellement (donc, pas de changement en Lui); mais la multiplicité nécessaire à cela ne détruit pas en lui son unité et ne change rien au fait qu'il est, Lui seul, celui qui existe nécessairement et éternellement.
Et si Dieu n'a pas besoin de sa création pour vivre son amour, c'est parce qu'en lui-même, existe une pluralité de personnes, n'abolissant pas toutefois l'unité de sa nature.
Il y a donc un Dieu, qui est éternellement Père, parce qu'il engendre éternellement et nécessairement (= hors du temps) le Fils, dont il est donc impossible de dire "il y a un temps où il n'était pas".
Ce Fils, consubstantiel au Père, est ainsi Lumière de Lumière, Vrai Dieu de Vrai Dieu, engendré et non créé, comme le dit le Symbole, sur la base de l’Écriture, principalement des Évangiles attestant sa divinité.
Le Saint-Esprit procède également du Père, par spiration. Il est Seigneur qui donne la vie, adoré avec le Père et le Fils.
Ainsi, Dieu est amour, car il ne lui est pas moins nécessaire d'être que d'être en trois personnes, d'une seule et même nature divine, vivant dans l'amour (Jean 5. 20; etc.)
II. Témoignage scripturaire
On aurait tort, toutefois, d'imaginer que l’Église confesse le dogme Trinitaire sur la base des conceptions exposées ci-dessus. En effet, si cet article s'accorde avec le fait que Dieu est amour, c'est avant tout sur des témoignages autrement plus explicites et concrets de l’Écriture, seule norme ultime de la foi, que nous appuyons notre foi.
Notons ainsi que la Trinité se manifeste à des moments aussi capitaux que la conception du Christ, et à son baptême (Luc 1. 35; 3. 21-22...)
On la voie également, même si les anciens n'en avaient pas une intelligence aussi claire que nous, à la Création (Dieu, son Esprit et son Verbe = le Fils Genèse 1. 1-3).
Cette même Trinité est invoquée également à notre baptême (Matthieu 28. 19), où trois sont nommés: le Père, le Fils, et le Saint Esprit.
Or, si trois sont nommés, pourquoi le Fils et le Saint Esprit ne seraient pas aussi personnels que le premier (le Père)?
Ou, si les deux autres (Fils et Esprit) sont personnels, au nom de quoi serait-il justifier qu'ils ne sont néanmoins pas aussi vraiment Dieu que le Père? Serait-il convenable que nous soyons baptisés au nom de Dieu et de deux satellites qui ne seraient que des créatures?
Idolâtrie!
Et certes, c'est au seul nom de Dieu que nous sommes baptisés, savoir, au nom du Dieu qui subsiste en trois personnes: Le Père, le Fils et le Saint Esprit.
Voyons maintenant si cela n'est pas encore confirmé ailleurs dans l’Écriture...
Le Verbe Divin, qui est le Fils éternel de Dieu, est nommé Dieu (Jean 1. 1; 20. 28). Les Juifs, sur ce point, ne s'étaient pas trompés (Jean 5. 18).
Le Saint Esprit, lui aussi, est appelé Dieu (Actes 5. 3-4; 1Co 3.16/12. 4-6; 11, etc.)
Que le Fils ait volonté, intelligence etc; cela est bien connu. La chose est souvent moins perçue au niveau de l'Esprit, hélas!
Et pourtant, l'Ecriture n'est pas vraiment timide à ce sujet. Non seulement la chose se laisse deviner lorsque le Christ le dénomme comme "un autre consolateur" (Jean 14. 16), qui instruit les disciples (Jn 14. 26; 16. 13, etc.) mais aussi, nous le voyons clairement attesté dans le reste de l’Écriture pour qui l'Esprit saint est "Esprit de sagesse, d'intelligence, de conseil et de fermeté" (Esaïe 11. 3) possédant la pensée (Rom 8. 27) la connaissance (Marc 2. 8; 1Co 2.11) qui parle (2 Sam 23. 2; Matthieu 10.20), qui affirme (Heb 10. 15) raisonne (Actes 15. 28), convainc ((Jean 16. 8), rend témoignage (Rom 8. 16) avertit (Néhem 9. 30; Actes 20. 33), sonde (1 Co 2.10) a des désirs (Gal 5.17; Jacq 4. 5), possède l'amour (Rom 15. 30), peut être attristé (Esaïe 63. 10; Eph 4. 30) outragé ((Heb 10. 29), qui exerce sa volonté ((1Co 12011), etc.
De quelle "force impersonnelle" peut on dire pareilles choses?
Il nous apparaît donc que la foi trinitaire, celle-là même de notre Baptême, est très solidement fondée sur l’Écriture, et qu'il nous faut donc reconnaître ce principe, qui est celui de la Chrétienté, qui consiste à adorer Dieu dans la Trinité, et la Trinité dans l'Unité, sans confondre les Personnes, et sans diviser l'essence divine.
AUGUSTINUS
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