Petit commentaire du Credo (1)





 Introduction

 Comprenant une brève explication de la notion de Symbole (1), de l'histoire du Symbole (2) et de la justification de son usage (3).

 

1. La notion de "Symbole"


Je présenterai, dans cette modeste série, un petit commentaire du Symbole de Nicée-Constantinople. 
Ce mot de « Symbole » vient du Grec συμβάλλειν  et désigne un signe de reconnaissance et de ralliement; dans le cas des chrétiens, il ne peut s'agir que de leur foi commune. Le Symbole de foi est donc un texte qui résume le contenu de la foi chrétienne.  
Pour savoir à qui conférer les sacrements et à qui ne pas les conférer, on demandait ainsi aux personnes si elles partageaient la foi telle que résumée dans ces formulaires ecclésiastiques (chaque Église locale avait le sien).  Philipp Schaff (Creeds of Christendom) a fait remarquer que cet usage du mot "Symbole" est déjà attesté sous la plume de st Cyprien de Carthage (épitre 69), au IIIe siècle : Eodum symbolo, quo et nos, baptizare.
Plus ou moins long, plus ou moins précis, tous ces documents portaient la même doctrine irréformable, comme l'écrivait Tertullien, dans son livre intitulé "Des vierges" (chapitre 1). En effet, que la foi soit demeurée inchangée depuis le premier siècle ne fait pour nous aucun doute (Jude 3). Comme l'écrivait st Athanase (Lettre à Sérapion, I: 38) : C'est sur elle, en effet, que l’Église a été fondée, et qui en déchoit ne peut plus ni être ni être appelé "chrétien".



2. Histoire du Symbole

Comment en est-on arrivé à ce Symbole de Nicée-Constantinople?

Voici la petite histoire de ce texte:

Au début des années 300, après une dernière vague de persécutions (sous l'empereur Dioclétien) le christianisme devint religion licite.
C'est que Constantin, le nouvel empereur, s'était imposé en battant son rival, Maxence, lors de la bataille du pont Milvius (28 octobre 312). Or, la veille de la bataille, Constantin aurait vu une croix dans le ciel, accompagnée de ces célèbres mots: In hoc signo vices / En ce signe tu vaincras. 
Que le chrétien s'arrête ici et s'interroge, non pas pour savoir si cette histoire est vraie ou si elle contient une part de légende, mais pour savoir si ces mots résonnent comme il se doit dans son cœur, dans sa vie quotidienne (c'est-à-dire : dans les difficultés, les épreuves et les tentations de ce monde) ; car comme l'écrit l'Apôtre : Dans toutes ces choses, nous sommes plus que vainqueurs par celui qui nous a aimés (Romains 8. 37).  L'apôtre Jean écrit semblablement : Tout ce qui est né de Dieu triomphe du monde ; et la victoire qui triomphe du monde, c'est notre foi (1Jean 5: 4).

Constantin, devenu empereur, devint donc favorable à l’Église du Christ et autorisa l'exercice de cette foi (édit de Milan, en 313), que l'on persécutait cruellement sous Dioclétien. Ici encore, que le chrétien considère combien le Seigneur prépare pour ses saints des soulagements et des motifs de louanges !

Mais voilà que bientôt (vers 318), en Égypte (à Alexandrie), une controverse théologique éclata entre l'évêque du lieu, Alexandre, et l'un des prêtres de la ville : Arius. Ce dernier enseignait que le Fils de Dieu était une très noble créature, sans doute la plus grande et la plus ancienne... mais pas Dieu. Outrés, Alexandre et le clergé alexandrin excommunièrent Arius, mais celui-ci trouva refuge et appui ailleurs. Très vite la situation s'envenima : les condamnations se mirent à pleuvoir ! La querelle arriva bientôt aux oreilles de Constantin qui s’inquiéta pour l'unité de son empire. Alors, sous les conseils de son directeur spirituel, l'évêque Hosius de Cordoue, Constantin finit par convoquer une assemblée, un concile - tout comme l'avaient fait les apôtres (Actes des apôtres, chapitre 15) et tout comme on l'avait fait, après eux, à divers échelons locaux. Constantin, qui avait les moyens d'un tel évènement, convoqua pour sa part un concile universel (œcuménique), invitant les évêques du monde entier à siéger pour trancher l'affaire. Environ 320 évêques (318, selon la tradition) purent finalement se réunir, à Nicée (actuelle Turquie), en mai 325. A la quasi-unanimité, ils condamnèrent Arius et ses thèses. A cette occasion, ils reprirent aussi le Symbole de foi alors en usage dans l’Église de Césarée, y apportèrent quelques précisions pour rendre la doctrine orthodoxe la plus claire et explicite possible (au sujet de la divinité du Fils de Dieu) ; il y ajoutèrent notamment le terme "Homoousios", c'est-à-dire: "consubstantiel" (on reviendra sur tout cela, dans les prochains articles) et ils s'entendirent pour proclamer que c'était là la doctrine et la foi de chacun d'eux.

N.B.: certaines sectes anti-trinitaires s'acharnent parfois à calomnier ce concile en disant que Constantin, nouveau converti venu du paganisme, se serait précipité à convoquer cette assemblée pour imposer une foi en "trois dieux" (sic) à l’Église et la corrompre. Ce serait là la ''grande apostasie''.
Rien n'est plus faux. En réalité, au début de la querelle entre Alexandre et Arius, Constantin exhorta simplement les deux partis à se réconcilier ; à ses yeux, croire que Jésus était Dieu ou qu'il ne l'était pas, ce n'était qu'une opinion sans importance pour la foi. Sozomène, dans son Histoire de l’Église (1: 16), résumait ainsi :
Après que plusieurs Conciles eurent été tenus en Égypte sans que les contestations eussent été apaisées, le bruit qu'elles faisaient se répandit jusques dans le Palais de l'Empereur Constantin, qui fut très fâché de voir qu'elles troublaient la Religion, au temps qu'elle commencent à s'accroître, et qu'ils détournaient plusieurs personnes de faire profession de la foi. Il en rejeta la faute sur Arius, et sur Alexandre, et les reprit d'avoir agité une question inutile, qui ne leur devait jamais être entrée dans l'esprit, ou qui si elle y était entrée, devait avoir été ensevelie sous le silence.
 Ce faisant, Constantin peut être accusé de n'avoir eu aucun discernement pour évaluer l'importance des dogmes ; il peut être accusé d'avoir été une sorte de libéral avant l'heure (le membre zéro de l'EPUdF ?) ; mais certainement pas de chercher à imposer une croyance, surtout pas païenne. La seule chose qu'il voulait, c'était qu'on ne menace pas l'intégrité de l'empire par des disputes (selon lui) trop amères. Ceux qui furent animés par l'intention d'en découdre avec Arius et son hérésie, ce fut l'assemblée des évêques et pasteurs (ces chrétiens de longue date qui, quelques années plus tôt, avaient résisté aux persécutions les plus féroces, au point que certains portaient encore dans leur chair les blessures et les cicatrices des tortures subies sous Dioclétien).


Toujours est-il que l'hérésie continua à faire des ravages encore des années plus tard. Un certain Athanase (jeune diacre à Alexandrie au moment du concile de Nicée, il devint l'évêque de la ville après la mort de son vieux maître Alexandre) Athanase d'Alexandrie, donc, mena la lutte (avec d'autres, comme Hilaire de Poitiers) au travers de bien des exils et tracas, car beaucoup d'empereurs furent, par la suite ariens.
Pour finir, un nouvel empereur, Théodose Ier, rétablit l'orthodoxie nicéenne, non sans avoir préalablement fait du christianisme la religion officielle de l'empire (édit de Thessalonique, en 380).
Théodose convoqua un nouveau concile universel à Constantinople, en l'an 381, au cours duquel le Symbole de Nicée fut complété pour étoffer sa partie consacrée à l'Esprit saint (le Symbole de Nicée, tout comme son modèle, le Symbole de Césarée, n'en disait presque rien, et cela avait permis l'émergence de nouvelles disputes à son sujet). 

Voilà donc pour la présentation de l'origine de notre Symbole.



3.  Réponse à une objection


Les chrétiens croient, comme je l'ai dit au début, que la foi de l’Église, pleinement révélée au Ier siècle, est immuable
Pourquoi parler, alors, du Symbole de Nicée-Constantinople, en référence à des conciles tenus, respectivement, en l'an 325 et en l'an 381 ? Comment voir, dans cette confession, celle de tous les chrétiens, sans commettre un malheureux anachronisme ?
      Une telle objection m'oblige à rappeler que le Symbole de Nicée-Constantinople ne fut pas, au IVe siècle, une création nouvelle, mais qu'il a procédé du Symbole, préexistant, de l’Église de Césarée -- lui-même très proche du Symbole de l’Église de Jérusalem, que st Cyrille de Jérusalem expliquait, dans ses fameuses Catéchèses baptismales. Ainsi, le Symbole de foi n'est une nouveauté ni quant à l'usage, ni quant à son propos. La question, toutefois, pourrait naturellement rebondir : puisqu'il existait déjà des Symboles avant celui que nous utilisons, et puisqu'ils étaient sans doute tous d'une orthodoxie équivalente au nôtre, pourquoi ne pas en être resté à ces textes et pourquoi, aussi, ne pas y revenir?
Un premier élément de réponse à cette objection se trouve dans l'objection elle-même : puisque les différents Symboles de l'Antiquité portaient essentiellement le même message que celui dont nous disposons à présent (équivalence d'orthodoxie), pourquoi vouloir tellement s'acharner contre ce dernier Symbole, qui les récapitule tous?
De plus, il faut remarquer qu'avec ce genre de remarques, les « super-apôtres » (cf. 2Corinthiens 11. 5) auraient pu dire, semblablement, la chose suivante : Puisque les non-Juifs sont entrés dans l’Église de nombreuses années avant la tenue du concile de Jérusalem (Actes 10/Actes 15), et que les conditions de leur admission existaient alors déjà nécessairement, pourquoi ne pas en être restés à ce qui était en usage, à cette époque ? Pourquoi faire si grand cas des décisions de ce synode (Actes 16. 4). Pourquoi donc, ne pas abolir l'édit du concile subséquent? 

Voilà assurément les conclusions délirantes et scélérates qui s'imposeraient, si on adoptait la logique selon laquelle l’Église ne serait pas fondée à préciser ou à renforcer l'expression de ses croyances ! Et à vrai dire, de tels disputeurs ne finiront jamais d'objecter des sophismes pour rejeter la vérité. Par conséquent, il convient de s'en tenir à la simplicité chrétienne, en leur répondant, une fois pour toutes, comme suit :  

D'une part, les nombreux résumés de la foi, qui s'étaient imposés de façon coutumière, variaient formellement selon les lieux, et cette multitude de textes variaient donc aussi, sans doute, quant à leur degré de précision. Une forme standardisée ne pouvait donc que simplifier les choses et avantager le bon ordre dans l’Église. 
D'autre part, si l’Église, devenue religion licite, a dû se doter partout de la même confession, ce n'est ni par un vouloir arbitraire de la part de certains de ses membres, ni fortuitement, mais en raison de l’ingéniosité et de l'acharnement inouïs de son ennemi, qui n'espérait plus la détruire par la force des armes et des violences extérieures, mais par le venin, le plus concentré possible, de l'hérésie. C'est ce dont témoigne la terrible crise arienne, commencée à cette époque, qui ébranla les Églises de l'empire durant de nombreux siècles.
Ne pas répondre à cette menace, c'eut été, vraiment, un crime par omission. Ne pas se souvenir de cette leçon, ce serait, vraiment, une persévérance diabolique dans une insouciance mortelle. Vouloir défaire l'histoire et composer un nouveau Symbole, ce serait vouloir plonger la chrétienté dans des querelles interminables et inutiles ! Quant à moi, n'étant pas possédé par l'esprit de contestation, de querelles et de vaines recherches, c'est le Symbole de cette antique tradition que je veux m'employer à professer et expliquer dans cette série.


A suivre...

Bucerian

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