Blasphème, offenses et totalitarisme

L'attentat de Charlie Hebdo a récemment soulevé la question des lois anti-blasphème ou, plutôt, de lois couardes déguisées en lois contre le blasphème.
Voici pourquoi, en tant que chrétien, je ne suis pas favorable à ce genre de lois.

Le rejet du blasphème

Qu'on ne s'y trompe pas: mon propos n'est pas de soutenir le droit de l'homme à ricaner sur tout, à mépriser tout ce qu'il veut, même Dieu.
Contrairement à Charlie Hebdo, je ne place pas le droit au sacrilège au-dessus de tout et je ne voue pas un culte aveugle à la liberté d'expression.
Disons-le, même: étant chrétien, je déteste, j'exècre le blasphème.

Mais la condamnation du blasphème doit avoir un fondement théocentrique: le blasphème n'est pas condamnable parce qu'un homme pieux, en l'entendant, risque de s'en trouver peiné; le blasphème est condamnable parce qu'il est un outrage, une injure au Dieu vivant.
Et attention: le Dieu vivant, ce n'est ni Krishna, ni Allah, ni l'arbre qu'un animiste adore dans la forêt.
Père... que Ton Nom soit sanctifié!
Ainsi, puisqu'il est hors de question de défendre l'honneur du vrai Dieu à même titre que l'honneur d'une idole, il est hors de question de soutenir une loi consistant à se garder superstitieusement de contrarier l'éventuel dieu-arbre, ou dieu-caillou, de je ne sais quelle secte obscure.
Si une loi anti-blasphème devait être votée, il ne pourrait s'agir que d'une loi authentiquement anti-blasphème, c'est-à-dire exclusivement consacrée à la gloire du seul  Vrai Dieu. Mais la conséquence serait terrible pour beaucoup de monde, notamment pour les musulmans, puisqu'elle interdirait la diffusion du coran, dont le contenu est une injure au Fils unique de Dieu (Jean 5, 23). 
Est-ce là ce que souhaitent les zélateurs islamistes?
Heureusement pour eux, s'il n'existe aucune tolérance théologique pour leurs blasphèmes dans le sein de l’Église,  nous n'avons pas le projet de déclencher une guerre civile en attaquant la tolérance politique dont ils jouissent dans la République.


Le rejet des moqueries

On pourrait alors penser à une autre sorte de loi. Non pas une loi anti-blasphème, mais une loi plus anthropocentrique, comme celle à laquelle pense François, en disant de ne pas se moquer de la foi d'autrui.
L'idée n'est pas ici de chercher la gloire de Dieu pour elle-même, mais de chercher le respect du prochain en évitant de le blesser en raillant ses croyances.
Certes, en tant que chrétien, je sais bien qu'il faut se montrer charitable; mais que vaudrait une loi consistant simplement à interdire de "dénigrer" l'objet de la foi d'autrui?
Que deviendrait par exemple le Psaume 115, aux yeux d'une telle loi?
Quel païen ne s'offusquerait pas d'entendre que son dieu est un truc sourd et aveugle? 
Par conséquent, je pense que le tact ne se décide pas par une loi, dans le code pénal.

Reste la possibilité d'interdire simplement toute diffamation, contre toute personne supposée avoir existé un jour.
Mahomet serait inclus, la parole publique serait moins infestée d'abjections susceptibles de provoquer des haines; bref, le respect serait sauf, la République aussi.

... Ou plutôt, non. Car, pour ce qui concerne la dernière Une de Charlie Hebdo, il est évident que rien d'injurieux, d'obscène ou de dégradant n'a été dessiné. Et pourtant...


Conclusion:

Quand une partie du monde (là où l'on assassine des enfants, brûle des églises...) s'enflamme contre un grand pays à cause de la Une d'un journal insignifiant, ce n'est pas le signe que ce journal a outrepassé les bornes (même s'il est vrai que Charlie Hebdo les a maintes fois dépassées, surtout contre le christianisme!); c'est le signe que le pays en question est confronté à une menace totalitaire.
Ce que l’Église doit faire alors, c'est combattre par la prière. 
Et l’État, combattre par la bouche de ses canons.


Bucer

Commentaires

Anonyme a dit…
N'oublions pas que, selon la Confession d'Augsbourg, le mahométisme n'est qu'hérésie et blasphème:

"La Confession d'Augsbourg de 1530

Article 1. -- De Dieu
Nos Églises enseignent en parfaite unanimité la doctrine proclamée par le Concile de Nicée : à savoir qu'il y a un seul Être divin, qui est appelé et qui est réellement Dieu. Pourtant, il y a en lui trois Personnes, également puissantes et éternelles : Dieu le Père, Dieu le Fils, Dieu le Saint-Esprit ; tous les trois un seul Être divin, éternel, indivisible, infini, tout-puissant, infiniment sage et bon, créateur et conservateur de toutes choses visibles et invisibles. Par le terme de Personne, nous ne désignons pas une partie ni une qualité inhérente à un être, mais ce qui subsiste par lui-même. C'est ainsi que les Pères de l'Église ont entendu ce terme.
Nous rejetons donc toutes les hérésies contraires à cet article : nous condamnons les Manichéens qui ont statué deux dieux, un bon et un mauvais, les Valentiniens, les Ariens, les Eunomiens, les Mahométans et autres. Nous condamnons aussi les Samosaténiens, anciens et modernes, qui n'admettent qu'une seule Personne, et qui, en usant de sophismes impies et subtils, prétendent que le Verbe et le Saint-Esprit ne sont pas des personnes distinctes, mais que le « Verbe » signifie parole ou une voix, et que le « Saint-Esprit » ne serait autre chose qu'un mouvement produit dans les créatures."

Anonyme a dit…
Excellent article.

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