Ephèse (1ere session: 22 juin 431).
2e lettre de Cyrille d'Alexandrie à Nestorius
Cyrille, au collègue très religieux et bien-aimé de Dieu, Nestorius: salutation dans le Seigneur.
J'apprends que certains parlent avec imprudence de l'estime en
laquelle je tiens ta Charité, et que c'est fréquemment le cas,
surtout au moment où les autorités se réunissent. Je suppose qu'en
agissant ainsi, ils pensent dire quelque chose qui te sera agréable,
mais ils parlent sans raison, car ils n'ont souffert aucune injustice
de ma part mais ont été exposés pour leur bien. L'un d'eux parce
qu'il opprimait l'aveugle et le nécessiteux, et l'autre pour avoir
blessé sa mère avec une épée. Un autre enfin, parce qu'il avait
dérobé de l'argent à quelqu'un avec la complicité d'une
domestique, et à qui on imputait des crimes tels que personne ne les
souhaiterait à ses pires ennemis.
J'accorde peu d'importance aux paroles de telles personnes, car le
disciple n'est pas plus grand que le maître et que je ne voudrais
pas non plus élever ma petite personne au-dessus des Pères; je sais
en effet que peu importe le genre de vie que l'on choisit, il n'est
jamais possible d'échapper aux calomnies des méchants, dont les
bouches sont pleines de malédictions et d'amertume, et qui devront
rendre des comptes au Juge de tous. En revanche, je reviens au point
que j'avais spécialement à l'esprit; et je te conjure, comme un
frère dans le Seigneur, de dispenser la Parole d'instruction et la
doctrine de la foi au peuple avec la plus grande exactitude, et de
bien considérer qu'en scandalisant même le plus petit de ceux qui
croient en Christ, on s'expose à l'insoutenable indignation de Dieu.
De combien de diligence et de science aurons-nous donc besoin d'user,
quand la multitude de ceux qui sont blessés est si grande, pour
administrer, à ceux qui la cherchent, la Parole de vérité qui
guérit?
Cela, nous l'accomplirons le plus excellemment si nous retournons aux paroles des saints Pères, et que nous obéissons à leurs ordres avec zèle, prouvant que nous sommes dans la foi conformément à ce qui est écrit, et que nous conformons nos pensées à leur juste et irrépréhensible enseignement.
Cela, nous l'accomplirons le plus excellemment si nous retournons aux paroles des saints Pères, et que nous obéissons à leurs ordres avec zèle, prouvant que nous sommes dans la foi conformément à ce qui est écrit, et que nous conformons nos pensées à leur juste et irrépréhensible enseignement.
Le saint et grand concile déclare donc que le Fils Unique-engendré,
né selon la nature de Dieu le Père, vrai Dieu de vrai Dieu, Lumière
de Lumière, par qui le Père a fait toutes choses, est descendu et
s'est incarné, et a été fait homme, a souffert, et est ressuscité
le troisième jour, et qu'il est monté aux cieux. Ces paroles et ces
décrets, nous devons les suivre, considérant ce qui est signifié
par le Verbe de Dieu incarné et fait homme.
Nous ne disons pas en effet que la nature du Verbe par suite d'une
transformation est devenue chair, ni non plus qu'elle a été changée
en un homme complet, composé d'une âme et d'un corps, mais plutôt
ceci : le Verbe, s'étant uni selon l'hypostase une chair animée
d'une âme raisonnable, est devenu homme d'une manière indicible et
incompréhensible et a reçu le titre de Fils d'homme, non par simple
vouloir ou bon plaisir, ni non plus parce qu'il en aurait pris
seulement le personnage ; et nous disons que différentes sont les
natures rassemblées en une véritable unité, et que des deux il est
résulté un seul Christ et un seul Fils, non que la différence des
natures ait été supprimée par l'union, mais plutôt parce que la
divinité et l'humanité ont formé pour nous l'unique Seigneur
Christ et Fils par leur ineffable et indicible concours dans l'unité.
Ainsi, bien qu'il subsiste avant les siècles et qu'il ait été
engendré par le Père, il est dit aussi avoir été engendré selon
la chair par une femme, non point que sa nature divine ait commencé
à être en la sainte Vierge, ni qu'elle ait eu nécessairement
besoin d'une seconde naissance par elle après celle qu'il avait
reçue du Père, car c'est légèreté et ignorance de dire que celui
qui existe avant les siècles et est coéternel au Père a besoin
d'une seconde génération pour exister,- mais puisque c'est pour
nous et pour notre salut qu'il s'est uni selon l'hypostase
l'humanité, et qu'il est né de la femme, on dit qu'il a été
engendré d'elle selon la chair.
Car ce n'est pas un homme ordinaire qui a d'abord été engendré de
la sainte Vierge et sur lequel ensuite le Verbe serait descendu, mais
c'est pour avoir été uni à son humanité dès le sein même qu'il
est dit avoir subi la génération charnelle, en tant qu'il s'est
approprié la génération de sa propre chair. C'est ainsi que nous
disons qu'il a souffert et qu'il est ressuscité, non pas que le Dieu
Verbe ait souffert en sa propre nature les coups, les trous des clous
et les autres blessures (car la divinité est impassible, puisqu'elle
est incorporelle); mais puisque le corps qui est devenu le sien
propre, a souffert tout cela, on dit encore une fois que c'est lui
(le Verbe) qui a souffert pour nous : l'Impassible était dans le
corps qui souffrait et c'est de la même façon que nous pensons au
sujet de sa mort. Car le Verbe de Dieu est par nature immortel,
incorruptible, vie et vivifiant. Mais encore une fois puisque son
propre corps a, par la grâce de Dieu, goûté la mort pour tout
homme, comme dit Paul (Hébreux 2: 9), on dit qu'il a souffert la
mort pour nous : non qu'il ait fait l'expérience de la mort en ce
qui regarde sa propre nature (ce serait folie de dire cela ou de le
penser), mais parce que, comme je l'ai dit à l'instant, sa chair a
goûté la mort. Ainsi, sa chair étant ressuscitée, on parle de la
résurrection du Verbe, non point que le Verbe soit tombé dans la
corruption, non certes, mais encore une fois parce que son corps est
ressuscité.
Nous confessons donc un Christ et Seigneur, non pas comme adorant un
homme avec le Verbe (cette dernière expression: avec la Parole
suggère l'idée d'une division) mais comme un seul et même,
étant donné que le corps du Verbe, avec lequel il trône avec le
Père, n'est pas séparé du Verbe lui-même, non pas comme si deux
fils siégeaient avec Lui, mais plutôt un seul, en vertu de l'union
avec la chair.
Si donc nous rejetons l'union personnelle comme impossible et
inconvenante, nous tombons dans l'erreur de parler de deux fils, car
il sera nécessaire de distinguer et de dire que celui qui était
proprement un homme fut honoré avec le titre de “Fils”,
tandis que celui qui est proprement le Verbe de Dieu, possède, par
nature, aussi bien le nom que la réalité de la filiation.
Nous ne devons donc pas diviser l'unique Seigneur Jésus-Christ en
deux Fils. Il ne sera pas non plus profitable à une foi saine de
soutenir (comme le font certains) l'idée d'une union de personnes;
car l’Ecriture ne dit pas que le Verbe a uni à Lui-même la
personne d'un homme, mais qu'il a été fait chair. Cette expression:
le Verbe a été fait chair ne veut toutefois rien dire
d'autre qu'il a partagé la chair et le sang avec nous; il a fait
notre corps sien, qu'il est sorti homme d'une femme, sans se
débarrasser de son existence en tant que Dieu, ou de sa génération
par le Père, mais en demeurant tel qu'il était tout en assumant la
chair. Cela, la déclaration de la foi orthodoxe le proclame partout.
C'est ainsi qu'ils (les saints Pères) se sont enhardis à nommer la
sainte Vierge “Mère de Dieu”, non que la nature du Verbe
ou sa divinité ait reçu le début de son existence à partir de la
sainte Vierge, mais parce qu'a été engendré d'elle son saint corps
animé d'une âme raisonnable, corps auquel le Verbe s'est uni selon
l'hypostase et pour cette raison est dit avoir été engendré selon
la chair.
Ces choses, donc, je te les écris pour l'amour du Christ,
t'implorant comme un frère, te témoignant, devant le Christ et les
anges élus, que tu enseignes et penses ces choses avec nous, afin
que la paix des Eglises puisse être préservée et que le lien de la
concorde et de l'amour demeure intact parmi les prêtres de Dieu.
Salue les frères qui sont avec toi. Ceux qui sont avec moi te
saluent dans le Christ.
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